Un site d’informations peut-il ruiner une compagnie aérienne ? Oui, c’est possible !
Publié le 11/09/2008 par Etienne Wery
Par un incroyable concours de circonstances, la compagnie aérienne United Airlines (UAL), a subi cette semaine une descente aux enfers causée par des sites d’informations en ligne, dont une dépêche ancienne a été reprise en chaine jusqu’à causer un effondrement du cours de bourse.
En début de semaine, le monde aéronautique est secoué par une nouvelle alarmante : dans un contexte survolté causé par la proximité de la date-anniversaire des événements du 11 septembre, une agence de presse l’annonce : UAL, l’une des plus grandes compagnies aériennes américaines, demande la protection du chapitre 11 de la loi. En gros, l’on peut comparer cela à une mise sous concordat qui rime malheureusement souvent avec faillite prochaine.
Le monde financier, lui aussi soumis à rude épreuve depuis un an, se met en branle : Vendez ! Vendez !
En quelques minutes (!), le cours de bourse s’effondre et perd deux tiers de sa valeur. Les autorités boursières réagissent aussitôt et suspendent la cotation mais c’est trop tard, le mal est fait.
Vient alors (seulement, oserait-on écrire …), le temps de la réflexion : comment personne n’a-t-il vu le vent venir ?
Et chacun de se retourner vers l’agence de presse, pressée de fournir plus de détail.
C’est là que l’on découvre le pot aux roses : la compagnie nie, se défend, menace l’agence de presse. Elle n’a jamais demandé la protection du chapitre 11.
L’on sait aujourd’hui que l’information était bel et bien véridique … mais ancienne ! Il est vrai qu’en 2002, aux lendemains des attentats, la compagnie avait en effet demandé la protection du chapitre 11, mais elle en est sortie depuis lors.
Comment cela a-t-il été possible ? La planète internet croit avoir trouvé la solution :
- Un brave internaute américain, mangeant son sandwiche, surfe sur le site de son journal favori (le Sun Sentinel, émanation du Chicago Tribunes).
- Il y lit le vieux communiqué, émis en 2002, annonçant à l’époque la demande de protection du chapitre 11.
- Il passe à autre chose, sans savoir que comme il y a peu de lecteurs à ce moment, sa consultation de l’article pèse lourd dans les statistiques de fréquentation tenue en temps réel, de sorte que le moteur du site du Sun Sentinel fait automatiquement passer la dépêche dans les « most read news » et l’affiche en Une !
- En quelques secondes, Google News passe par là et avale l’information figurant en Une.
- Google News l’affiche sur son propre site, et c’est là qu’un préposé de l’agence de presse découvre l’info et se dit « C’est de la bombe ! Je la diffuse avant tout le monde ».
Une magnifique illustration de l’effet papillon : un battement d’aile de papillon à l’autre bout du monde peut provoquer une tornade ici.
Tout le monde se renvoie évidemment la balle : le journal accuse Google, qui répond que l’info n’était pas datée ou alors pas clairement, pendant que l’agence de presse jure que la prochaine fois elle veillera à croiser ses sources.
Il reste que des sommes phénoménales sont parties en fumée, et que plusieurs actionnaires lésés entendent bien obtenir réparation.
Qui est responsable ? Ce pourrait être une question d’examen…