Responsabilité de l’hébergeur : un fournisseur condamné en Belgique
Publié le 05/02/2000 par Sophie Malengreau
Le tribunal de commerce de Bruxelles a rendu le 2 novembre 1999 un jugement dans une affaire opposant l’ASBL IFPI et la SA POLYGRAM à la SA BELGACOM SKYNET. Le texte original du jugement (en néerlandais) est reproduit ci-dessous, ainsi qu’une traduction libre en français. Cette traduction n’a pas été simple, la formulation utilisée par…
Le tribunal de commerce de Bruxelles a rendu le 2 novembre 1999 un jugement dans une affaire opposant l’ASBL IFPI et la SA POLYGRAM à la SA BELGACOM SKYNET. Le texte original du jugement (en néerlandais) est reproduit ci-dessous, ainsi qu’une traduction libre en français. Cette traduction n’a pas été simple, la formulation utilisée par le juge apparassant à plusieurs endroits équivoque.
Il faut insister sur le fait que ce jugement a été frappé d’appel. L’appel est en cours et nous ne commentons habituellement pas les jugements non définitifs, mais l’importance de la matière et la rareté de ce type de jurisprudence en Belgique justifie cette exception.
Les faits :
La société Skynet héberge les sites « somnus » et « freemusic ». Ceux-ci offrent des hyperliens vers des sites qui permettent des enregistrement musicaux en format MP3.
Pour rappel, MP3 est un format de compression des fichiers sonores qui réduit leur taille, et permet leur transmission sur réseaux informatiques. En quelques minutes, l’équivalent d’un CD peut être téléchargé. La qualité est la même que celle d’un CD acheté dans les commerces. L’utilisation de ces fichiers est parfois effectuée sans l’autorisation du producteur et est dans ce cas souvent illicite, ce qui a mené à des actions judiciaires. Pour plus d’informations, vous pouvez examiner nos actualités précédentes via le mot-clef MP3.
L’ASBL IFPI et la SA POLYGRAM ont à deux reprises mis la SA BELGACOM SKYNET en demeure de supprimer ces liens.
En l’absence de réaction positive de la SA BELGACOM SKYNET à cette injonction, elles ont introduit une action en cessation en invoquant que ce comportement était contraire aux usages honnêtes en matière commerciale (article 93 LPCC).
Arguments de la SA BELGACOM SKYNET :
A titre principal :
Incompétence du tribunal de commerce dans la mesure où les demanderesses invoquent une violation à des droits d’auteur et droits voisins et que dans ce cas, le tribunal de première instance est le seul compétent
Irrecevabilité de l’action notamment en raison de l’absence d’intérêt et de qualité dans le chef des parties demanderesses
A titre subsidiaire – au fond – :
En tant que fournisseur d’hébergement, elle n’a aucune obligation de contrôler les sites hébergés et ne peut être tenue directement responsable de l’atteinte à un quelconque droit de tiers résultant de l’information qu’elle héberge
N’a pas à supporter une coresponsabilité avec les titulaires des sites concernant des hyperliens, principalement pour le motif qu’ils constituent uniquement un moyen pour se brancher sur l’information d’un autre site
-
Elle est étrangère au contenu illicite auquel le site se réfère et ce contenu illicite n’est d’ailleurs pas démontré
A titre infiniment subsidiaire :
Non-fondement de la demande à la condamnation d’une astreinte et d’une publication
Réponses du juge :
Il se considère compétent pour les motifs suivants :
La demande en cessation est relative à des actes contraires aux usages honnêtes en matière commerciale dans la mesure où elle vise le fait de favoriser à l’intérieur d’un secteur commercial et de manière consciente des actes de contrefaçon.
La violation aux droits d’auteur ou droits voisins n’est invoquée que de manière incidente et indirecte à savoir au niveau de l’éventuelle vérification de pratiques illicites
Il conclut à la recevabilité de l’action introduite par l’IFPI et POLYGRAM RECORDS. L’IFPI représente les droits et les intérêts de l’industrie phonographique et est à ce titre autorisée à s’opposer aux actes menaçant les intérêts professionnels de ses membres, comme la distribution illicite de phonogrammes. Quant à POLYGRAM, sa qualité de distributeur de nombreux phonogrammes en Belgique justifie son intérêt à agir
Au fond, il développe le raisonnement suivant :
La SA BELGACOM SKYNET peut être considérée comme responsable dès lors qu’elle ne supprime pas les liens alors qu’elle a été mise au courant d’activités suspectes.
Les liens dont question sont des liens conscients vers des sites pirates web connus ; la SA BELGACOM SKYNET s’est donc rendue complice de la mise à disposition du public belge de reproductions de fichiers de musique
- La SA BELGACOM SKYNET cause en conséquence une exploitation illégale en Belgique et des actes illégitimes.
Il considère que les deux mesures sollicitées, l’astreinte et la publication, sont justifiées car elles contribuent à la cessation des infractions et de leurs conséquences préjudiciables.
Dans le dispositif du jugement, le juge condamne Belgacom Skynet à cesser ces pratiques sous peine d’une astreinte et a autorisé la publication d’un résumé du jugement sur la homepage du site de Belgacom Skynet ainsi que dans cinq journaux.
Notre commentaire :
ll nous semble que le juge s’est montré relativement sévère à l’égard de Belgacom Skynet en considérant que dès lors que Belgacom Skynet avait été informée du caractère ilicite du contenu, elle se devait de le retirer (voir §6 « concernant le fond » : « que la défenderesse peut être considérée comme responsable de telles infractions en tant que vendeur, lorsqu’elle ne supprime pas les liens en question alors qu’elle a été mise au courant d’activités suspectes, comme en l’espèce « ).
S’il est vrai que Belgacom Skynet a été mise au courant par les demanderesses de l’existence sur deux sites hébergés de liens vers des sites de MP 3, elle ne pouvait pas être certaine que le contenu du site lié était effectivement illicite et donc s’il lui appartenait d’enjoindre à ses clients d’enlever les liens dont question.
Le juge n’a t’il pas réalisé un renversement de la charge de la preuve en obligeant le fournisseur d’hébergement à juger lui-même si oui ou non le contenu du site hébergé ou lié est illicite ? dans une matière quasi-délictuelle comme celle-ci, n’appartient-il pas au seul demandeur de prouver ce qu’il prétend ? Le fournisseur d’hébergement ne doit-il pas intervenir que quand il est suffisamment assuré par le demandeur que le site qu’il héberge ou que le site vers le lequel le site hébergé établit un hyperlien a un contenu illicite ? le fournisseur d’hébergement serait-il contraint de s’entourer de consultants pour procéder lui-même à des examens de liciété de sites web qu’il héberge?
Nous constatons qu’un seul attendu inséré en fin de motivation évoque la question de la preuve dans le chef des demanderesses : « Attendu que l’astreinte, dans le cas présent, apparaît justifiée pour autant qu’elle garantisse que la défenderesse prendra effectivement les mesures nécessaires à l’égard des liens bien déterminés dont Skynet a eu connaissance et dont elle, via ses clients, ne reçoit pas de preuve de légalité « . Cet attendu est toutefois isolé par rapport à l’ensemble de la motivation et ne figure pas dans le dispositif. Il laisse dès lors planer un doute sur l’étendue de l’obligation des parties demanderesses quant à la question de la preuve.
Le juge n’a t’il pas esquivé cette question de preuve par une généralisation du caractère illicite des sites permettant l’utilisation des fichiers MP3 ? N’a t’il pas perdu de vue que certains de ces sites exercent en effet une activité tout à fait licite et irréprochable soit parce qu’ils sont munis des autorisations des producteurs des phonogrammes pour des enregistrements de ce type soit parce que les fichiers MP 3 se rapportent aux productions du site exploitant ?
Nous attendons avec intérêt la décision qui sera rendue par la cour d’appel et nous n’omettrons pas de le commenter dans une prochaine actualité.
Nous trouvez ci-dessous le jugement dans son intégralité et une traduction en français.
VERSION ORIGINALE (NEERLANDAIS) | TRADUCTION LIBRE |
IN ZAKE :
| EN CAUSE :
|
TEGEN :
| CONTRE :
|
Gelet op de bepalingen van de wet van 15 juni 1935 op het gebruik der talen in gerechtszaken; Gelet op de geregistreerde dagvaarding de dato 26 februari 1999; Gelet op het vonnis de dato 30 juni 1999 waarbij de heropening van het debat werd bevolen; Gelet op de conclusies van partijen; | Vu les dispositions de la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire; Vu la citation enregistrée en date du 26 février 1999; Vu le jugement en date du 30 juin 1994 à l’occasion duquel la réouverture des débats a été ordonnée; Vu les conclusions des parties; |
Overwegende dat de vordering ertoe strekt:
| Attendu que la demande tend à :
|
Overwegende dat eiseressen, die zeggen dat eerste eiseres een beroepsvereniging is in de zin van art. 98 § lid 3 van de wet van 14 juli 1991 betreffende de handelspraktijken en de voorlichting en bescherming van de consument en de belangrijkste producenten en verdelers van fonogrammen groepeert (d.w.z. van muziekopnames), terwijl tweede eiseres, lid van eerste eiseres, de rechtmatige verdeler is, in België, van de cd’s waarop opnames voorkomen van vooraanstaande artiesten (popgroep U2, Georges Michael, enz.), in hun dagvaarding uiteenzetten dat zij hebben vastgesteld dat verweerster zich schuldig maakt aan een inbreuk op art. 93 WHPC, welke inbreuk als volgt wordt omschreven:
Dat eiseres dit gedrag van verweerster met de eerlijke handelsgebruiken strijdig (art. 93 WHPC) noemt; Dat zij onderstreept dat deze daad van aard is een mogelijke schade toe te brengen (zelfs reële) aan hun beroepsbelangen; | Attendu que les demanderesses, qui indiquent que la première demanderesse est une association professionnelle au sens de l’article 98 § 3 LPCC qui regroupe les producteurs les plus importants et les distributeurs de phonogrammes (c.à.d. d’enregistrements musicaux), tandis que la deuxième demanderesse, membre de la première demanderesse, est le distributeur légitime, en Belgique, des CD contenant des enregistrements d’artistes éminents (U2, Georges Michael, etc.), exposent dans leur citation qu’elles ont constaté que la défenderesse se rendait coupable d’une infraction à l’article 93 LPCC, laquelle infraction peut être décrite comme suit:
Que les demanderesses considèrent ce comportement comme étant « contraire aux usages honnêtes » (article 93 LPCC); Qu’elles soulignent que cet acte est de nature à causer un dommage possible (ou même réel) à leurs intérêts professionnels; |
Overwegende dat verweerster, in hoofdorde, aanvoert dat wij, overeenkomstig artikel 96 WHP onbevoegd zijn om over deze vordering uitspraak te doen; Dat zij, ondergeschikt, enerzijds steunt op dezelfde exceptie van artikel 96 WHP, anderzijds op een afwezigheid van belang en hoedanigheid, om te stellen dat de vordering als onontvankelijk moet worden afgewezen; Dat zij, verder, pleit dat de vordering ongegrond is; Dat zij ons verzoekt akte te willen nemen van het feit dat een tussenpersoon die acces en/of host provider is, zoals zij, geen enkele verplichting heeft om de inhoud te controleren van de sites waartoe hij toegang verschaft of die hij host, en dat hij niet rechtstreeks aansprakelijk kan worden gesteld voor de aantasting, ingevolge die toegankelijk gemaakte of gehoste informatie, van om het even welke wettelijke verplichting of van om het even welk subjectief recht van derden; Dat verweerster, uiterst ondergeschikt, concludeert dat de vordering tot toekenning van een dwangsom alsmede van een publicatie ongegrond wordt verklaard; | Attendu que la défenderesse invoque à titre principal que conformément à l’article 96 LPCC, nous sommes incompétents pour juger une telle demande; Qu’à titre subsidiaire, elle soutient que la demande doit être rejetée pour cause d’irrecevabilité en se basant d’une part sur la même exception tirée de l’article 96 LPCC, et d’autre part sur l’absence d’intérêt et de qualité; Qu’elle soutient ensuite que la demande est non fondée; Qu’elle nous demande de prendre acte du fait qu’un intermédiaire, qui est fournisseur d’accès et/ou d’hébergement, comme elle-même, n’a aucune obligation de contrôler les sites dont elle fournit l’accès ou qu’elle héberge, et qu’elle ne peut pas être tenue directement responsable de l’atteinte, à quelqu’obligation légale que ce soit ou à quelque droit subjectif de tiers que ce soit, résultant d’une information à laquelle elle fournitl’accès ou qu’elle héberge; Qu’à titre infiniment subsidiaire, la défenderesse considère que tant la demande à la condamnation d’une astreinte qu’à celle d’une publication doit être déclarée non fondée. |
OMTRENT DE BEVOEGDHEID: Overwegende dat de artikelen 95 en 96 van de handelspraktijkenwet luiden:
Overwegende dat de uitzondering, vervat in artikel 96 HWP, op de regel van artikel 95 HWP restrictief moet worden uitgelegd; Dat het ter sprake komen van een schending van het auteursrecht en/of naburige rechten, in een proces betreffende beweerde oneerlijke handelspraktijk, niet tot gevolg heeft dat de stakingsrechter zich, op grond van het evenvermelde artikel 96 onbevoegd moet verklaren; Overwegende dat, in casu, de vordering niet strekt tot de stopzetting van een daad van namaking maar van onrechtmatige handelsdaden, te weten, het binnen een commerciële bedrijvigheid bewust bevorderen van door derden gepleegde daden van namaking; dat geen schending aangevoerd wordt van auteurs of naburige rechten,tenzij incidenteel, onrechtstreeks, met name, in de toetsing van mogelijke oneerlijke praktijken; Overwegende dat wij oordelen bevoegd te zijn om kennis te nemen van het geschil; | CONCERNANT LA COMPETENCE: Attendu que les articles 95 et 96 de la LPCC énoncent ce qui suit :
Attendu que l’exception à la règle de l’article 95, contenue dans l’article 96 LPCC, doit être interpretée restrictivement; Que le fait d’être en présence d’une atteinte au droit d’auteur et/ou aux droits voisins dans un procès concernant une pratique de commerce présumée illicite n’a pas pour conséquent que le juge de cessation doit se déclarer incompétent sur base de l’article 96; Attendu qu’en l’espèce, la demande ne tend pas à la cessation d’une acte de contrefaçon mais d’actes contraires aux usages honnêtes en matière commerciale, à savoir le fait de favoriser à l’intérieur d’un secteur commercial et de manière consciente des actes de contrefaçon; qu’aucune violation aux droits d’auteur ou droits voisins n’est invoquée sauf de manière incidente, et de manière indirecte à savoir au niveau de la vérification des éventuelles pratiques illicites; Attendu que nous nous considérons compétents pour prendre connaissance du litige. |
OMTRENT DE ONTVANKELIJKHEID: Overwegende dat artikel 98, 1 van de WHPC bepaalt: « 98. § 1. De vordering gegrond op artikel 95 wordt ingesteld op verzoek van : 1. de belanghebbenden ; (…) « Overwegende dat eerste eiseres, die krachtens haar statuten de rechten en belangen bekrachtigt van, met name, de belangrijkste producenten en verdelers van fonogrammen en van al diegenen die in Belgie deelnemen aan de activiteiten van de fonografische en audiovisionele nijverheid, daardoor, ertoe gerechtigd is zich te verzetten tegen daden die de handelsbelangen van gezegde personen bedreigen; Dat de belangen waarvan sprake in België worden aangetast; Dat verweerster, trouwens, een belgische « SERVICE PROVIDER » is; Dat ook de belangen van de muzieknijverheid? voor een deel? in België aangetast worden; dat dezelfde argumentatie geldt i.v.m. de toelaatbaarheid van de eis ingesteld door tweede eiseres, verdeler in België van CD?platen, en lid van I. F. P. I.; Overwegende dat de vordering ontvankelijk is, in hoofde van eiseressen, dat zij het eveneens is, inzoverre ze wordt ingesteld tegen verweerster, in strijd met de stelling van laatstgenoemde partij; dat de vordering immers een beweerde oneerlijke handelspraktijk wil zien stoppen; Dat verweerster, naar kan worden aangenomen, de enige is die zich in dat verband kan verdedigen; Dat de omstandigheid dat ook anderen aansprakelijk kunnen worden gesteld, met name, in het kader van illegale muziekdistributie geen afbreuk doet aan de specifieke aansprakelijkheid van Skynet; Dat eiseressen zich kunnen richten tegen elke persoon die zich aan oneerlijke daden schuldig maakt die inbreuken (mede) mogelijk maken op auteursrechten; dat elkeen, op zijn vlak, moet zorgen dat via internet geen inbreuken worden gepleegd; Dat eiseres, aangaande dit verweer terecht opmerkt dat dit deel van haar argumentatie, dat formeel de ontvankelijkheid van de vordering raakt, eigenlijk het de grond van de zaak betreft; | CONCERNANT LA RECEVABILITE: Attendu que l’article 98, 1 LPCC précise: « 98 § 1: La demande fondée sur l’article 95 est introduite à la requête : 1.des intéressés; (…) » Attendu que la première demanderesse qui, suivant ses statuts défend les droits et intérêts notamment des producteurs et des distributeurs les plus importants de phonogrammes et de tous ceux qui participent en Belgique aux activités de l’industrie phonografique et audiovisuelle, est de ce fait autorisée à s’opposer aux actes qui menacent les intérêts professionnels des dites personnes; Que les intérêts dont question sont lésés en Belgique; Que la défenderesse est d’ailleurs un « SERVICE PROVIDER » belge; Que les intérêts de l’industrie musicale sont aussi en partie lésés en Belgique; que la même argumentation vaut pour ce qui concerne la recevabilité de la demande introduite par la deuxième demanderesse, distributeur en Belgique de CD, et membre de l’IFPI; Attendu que la demande est recevable, dans le chef des demanderesses contrairement à ce qu’invoque la défenderesse;Que la demande tend à voir cesser un acte prétendu contraire aux usages honnêtes en matière commerciale; Que la défenderesse est la seule à se défendre dans ce contexte; Que la circonstance que d’autres personnes peuvent être considérées comme responsables, notamment dans le cadre de la distribution de musique illégale, ne peut remettre en cause la responsabilité spécifique de Skynet; Que les demanderesses peuvent agir contre toute personne qui se rend coupable de pratiques déloyales qui (contribuent à) rendre possible des infractions aux droits d’auteur; que toute personne, dans son domaine, doit veiller à ce qu’aucune infraction ne soit commise via internet; Que la demanderesse, concernant ce moyen de défense, remarque à juste titre que cette partie de l’argumentation, qui concerne formellement la recevabilité de la demande, porte en fait sur le fond de l’affaire; |
WAT DE ZAAK ZELF BETREFT: Overwegende dat verweerster, i.v.m. de grond van de zaak, pleit dat haar geen inbreuk op de eerlijke handelsgebruiken verweten kan worden, zoals die door eiseressen wordt beschreven in hun dagvaarding, en verduidelijkt in hun conclusie, in ‘t kort bewuste collaboratie aan illegale activiteiten van de klanten, terwijl een zorgvuldig handelaar, in dergelijk geval maatregelen zou treffen; Dat verweerster betwist enige verplichting te hebben de inhoud van een server na te gaan; Dat, volgens haar, geen sprake kan zijn van enige « mede aansprakelijkheid », des te meer nu de « hyperlinks » waarvan in het debat sprake is, loutere verwijzingen zijn die toelaten naar de doorverwezen informatie over te schakelen; Dat de onrechtmatige inhoud waarnaar verwezen wordt, en waaraan zij zelf vreemd is, overigens, niet is aangetoond; Overwegende dat het geding indirecte inbreuken betreft, te weten het verschaffen van een techniek (website hosten) om informatie ter beschikking te stellen via internet; Dat verweerster voor deze inbreuken als verkoper aansprakelijk gesteld kan worden, wanneer zij, zoals in casu, na attent te zijn gemaakt op verdachte activiteiten, de « links » in kwestie niet verwijdert; Dat wij, ter oplossing van deze zaak, onze keuze verklaren voor de beslissing van het Arrondissementsrechtbank te ‘s Gravenhage, gewezen op 9 juni 1999, die stelt dat « Service Providers door het zonder toestemming van eiseressen op hun computersysteem aanwezig hebben van een link » die bij activering een verveelvoudiging bewerkstelligt van werken waarop eiseressen het auteursrecht bezitten, op het scherm van de computer van de gebruiker, onrechtmatig handelen indien en voorzover zij van de aanwezigheid daarvan in kennis worden gesteld, voorts aan de juistheid van die kennisgeving in redelijkheid niet valt te twijfelen en de Service Providers alsdan niet zo spoedig mogelijk overgaan tot verwijdering van die link uit hun computersysteem; Overwegende dat deze redenering impliceert dat het louter « aanwezig hebben van een link » (en niet het zelf linken) de aansprakelijkheid van de provider doet ontstaan, indien, zoals in casu het geval is, het linken tot auteursrechtinbreuk kan leiden; Dat relevant is de kennis geving aan de juistheid waarvan redelijkerwijze niet te twijfelen valt; Dat, ten deze, geen ruimte is voor twijfels, daar er sprake is van bewust linken naar bekende web piraten (illegale MP3 bestanden); dat de medeplichtigheid van verweerster bij de ter beschikking stelling van het publiek in België, van onwettige reproducties van muziek bestanden voor gevolg heeft een onwettige exploitatie in België en een onrechtmatig handelen; Overwegende dat de dwangsom, in het huidig geval, verantwoord voorkomt, inzoverre ze waarborgt dat, t.a.v. welbepaalde links waarop de aandacht van Skynet wordt bevestigd en m.b.t. welke zij, via haar klanten, geen legaliteitsbewijs krijgt, zij de noodzakelijke maatregelen wel effectief treft; Dat de publicatiemaatregelen moeten bijdragen tot de stopzetting van de inbreuken en van hun nadelige gevolgen; dat zij eveneens verantwoord zijn; | CONCERNANT LE FOND: Attendu que la défenderesse, concernant le fond de l’affaire, invoque qu’aucune atteinte aux usages honnêtes en matière commerciale ne peut lui être reprochée, telle que précisée par les demanderesses dans la citation; que dans leurs conclusions, les demanderesses décrivent cette atteinte comme étant une collaboration consciente aux activités illégales des clients, indiquant qu’un commerçant prudent aurait pris dans ce cas des mesures; Que la défenderesse conteste devoir supporter la responsabilité de contrôler le contenu d’un serveur; Que, selon elle, il ne peut être question d’une « co-responsabilité », d’autant plus que lesdits « hyperliens » constituent de simples références qui permettent de se brancher sur l’information liée; Que le contenu illicite auquel le site se réfère, et auquel la défenderesse est étrangère, n’est d’ailleurs pas prouvé; Attendu que la présente procédure concerne des infractions indirectes, c.a.d. le fait de fournir une technique (website-hosten) permettant la mise à disposition du public de l’information via internet; Que la défenderesse peut être considérée comme responsable de telles infractions en tant que vendeur, lorsqu’elle ne supprime pas les » liens » en question alors qu’elle a été mise au courant d’activités suspectes, comme en l’espèce; Qu’en vue de trancher cette affaire, nous faisons nôtre (lire : » le raisonnement de « ) la décision du Tribunal de La Haye, rendue le 9 juin 1999, lequel a jugé que » Les Service Providers commettent un acte illicite, en mettant sans l’autorisation des demanderesses des liens sur leur système informatique qui, par leur activation permettent une reproduction des œuvres sur lesquelles les demanderesses, ont des droits d’auteur, sur l’écran de l’ordinateur du consommateur, si et pour autant qu’ils aient été mis au courant de ce fait, que l’on ne peut raisonnablement douter de l’exactitude de cette notification et que le Service Provider ne prend pas rapidement des mesures pour procéder à la suppression des liens du système ; Attendu que ce raisonnement implique que « la simple présence d’un lien » (et non le fait d’établir soi-même le lien) entraîne la responsabilité du provider, au cas où, comme en l’espèce, le fait de lier peut porter atteinte aux droits d’auteur ; Qu’il est relevant que l’on ne peut raisonnablement douter de l’exactitude de la notification ; Qu’en l’espèce il n’y a pas lieu de douter, dès lors qu’il s’agit de l’établissement, de manière consciente, de liens vers des sites pirates web connus (fichiers MP3 illégaux); que la complicité de la défenderesse, lors de la mise à disposition du public en Belgique de reproductions de fichiers de musique, cause une exploitation illégale en Belgique et des actes illicites; Attendu que l’astreinte, dans le cas présent, apparaît justifiée en ce qu’elle garantit que la défenderesse prendra effectivement les mesures nécessaires à l’égard des liens précis qui ont été portés à l’attention de Skynet et pour lesquels elle ne reçoit aucune preuve de légalité de la part de ses clients ; Que les mesures de publication doivent contribuer à la cessation des infractions et de leurs conséquences préjudiciables; qu’elles sont aussi justifiées; |
OM DEZE REDENEN, Wij, Jean Marie LAHAYE, Ondervoorzitter in de Rechtbank van Koophandel te Brussel, zetelend ter openbare terechtzitting der vorderingen tot staking ? zaal der kortgedingen, Gerechtsgebouw, in vervanging van de wettelijk belette Voorzitter, bijgestaan door Michel PLEVOETS , Griffier. Rechtsprekende op tegenspraak,
| PAR CES MOTIFS, Nous, Jean-Marie LAHAYE, Vice-président du Tribunal de Commerce de Bruxelles, siégeant à l’audience publique des demandes en cessation – salle des référés, Palais de Justice, remplaçant le Président, assisté par Michel Plevoets, Greffier. Statuant contradictoirement,
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