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Publicité en ligne pour les produits alcooliques : quel cadre juridique en France ?

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A l’heure où les Etats-Unis décident d’interdire le commerce électronique d’alcool, quel est le cadre juridique français applicable à la publicité de produits alcooliques sur l’internet ? La question est d’importance car les sites français foisonnent dans ce domaine. L’article L. 3323-2 du Code de la santé énonce que la propagande ou la publicité, directe…

A l’heure où les Etats-Unis décident d’interdire le commerce électronique d’alcool, quel est le cadre juridique français applicable à la publicité de produits alcooliques sur l’internet ? La question est d’importance car les sites français foisonnent dans ce domaine.

L’article L. 3323-2 du Code de la santé énonce que la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites, sont autorisées sur certains supports limitativement énumérés, à savoir notamment :

  1. Dans la presse écrite;
  2. Par voie de radiodiffusion sonore
  3. Sous forme d’affiches et d’enseignes ; sous forme d’affichettes et d’objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé,
  4. Sous forme d’envoi par les producteurs, les fabricants, les importateurs, les négociants, les concessionnaires ou les entrepositaires, de messages, de circulaires commerciales, de catalogues et de brochures, dès lors que ces documents ne comportent que les mentions prévues à l’article L. 3323-4 et les conditions de vente des produits qu’ils proposent ;

Une publicité pour l’alcool diffusée par l’internet pourrait-elle être concernée par l’une ou l’autre de ces hypothèses ?

  • La presse écrite

    Il est souvent affirmé que, dans la mesure où l’internet n’est pas expressément visé par l’article L. 3323-2, toute publicité diffusée par son intermédiaire serait interdite.

    Cette thèse nous paraît trop radicale.

    En effet, la question essentielle à se poser est celle de la qualification juridique du support internet au regard de la notion de presse écrite (la presse audiovisuelle étant exclue de l’énumération de l’article L. 3323-2) . La question a déjà été abondamment débattue, mais la jurisprudence n’est pas encore fixée.

    Une seule certitude en la matière : la législation sur les délits de presse, qui vise tant la presse écrite que la presse audiovisuelle, est applicable à l’internet.

    Quant à savoir si l’internet doit être qualifié de presse écrite ou de presse audiovisuelle, les avis sont partagés.

    Une partie de la doctrine plaide pour l’assimilation à la presse audiovisuelle, et peut se prévaloir de la loi n°2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986, qui distingue la correspondance privée des services de communication audiovisuelle, lesquelles comprennent, d’une part, les « services de radiodiffusion sonore et de télévision », et, d’autre part, les « services de communication en ligne ».

    Nous ne sommes pas convaincus par cet argument. En effet, le « classement » opéré par le législateur est maladroit et ne reflète pas la réalité juridique, dans la mesure où les services de communication audiovisuelle et les services de communication en ligne sont soumis à des régimes juridiques en grande partie différents.

    En réalité, il nous semble que la détermination du régime applicable devrait être fonction de la nature du contenu en cause. Ainsi, un article d’un journal en ligne devrait être assimilée à la presse écrite.

    Telle fut d’ailleurs la conclusion du tribunal d’instance du 11e arrondissement de Paris dans un jugement du 3 août 1999, qui a considéré que le contenu d’un site web à vocation informationnelle était assimilable à une publication de presse au sens de l’article 1er de la loi du 1er avril 1986 qui définit la publication de presse comme étant « tout service utilisant un mode écrit de diffusion de la pensée mis à la disposition du public en général ou de catégories de public et paraissant à intervalles réguliers ».

    Certes, certains textes prévus pour l’un ou l’autre support ne s’appliqueront pas toujours facilement à un environnement virtuel (le droit de réponse par exemple), mais le principe nous semble devoir s’imposer à l’avenir, au risque de créer des discriminations injustifiables.

    Par conséquent, nous plaidons pour l’assimilation à la notion de presse écrite, visée à l’article L. 3323-2 du Code de la santé, de tout contenu publicitaire sur l’internet qui en revêt les caractéristiques. Ainsi, une publicité pour de l’alcool dans un journal en ligne devrait être admise au même titre qu’une publicité identique dans un journal papier, tandis qu’une publicité en faveur d’une boisson alcoolisée dans un clip vidéo téléchargeable sera interdite.

    Bien entendu, la publicité, si elle est admise dans son principe, devra être conforme aux prescriptions du Code de la santé quant à son contenu (notamment : comporter un conseil de modération et « ne comporter aucune incitation dirigée vers les mineurs, ni évoquer d’aucune façon la sexualité, le sport, le travail, les machines et véhicules à moteur »).

  • Affichettes à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé

    Il convient de s’interroger sur la légalité au regard du Code de la santé de la publicité par « affichettes » à l’intérieur de sites web vendant des boissons alcooliques.

    Le Code de la santé exclut toute vente « automatisée » de boissons alcooliques ainsi qu’il ressort de l’article L.3322-8 : « La délivrance de boissons alcooliques au moyen de distributeurs automatiques est interdite ». Il nous semble dès lors difficile de soutenir que le vente par voie électronique puisse être admise, même au prix d’une interprétation très extensive des textes.

  • Publicités dans des messages, circulaires commerciales, catalogues et brochures

    Certains juristes hésitent à assimiler les courriels à des « messages, circulaires commerciales, catalogues ou brochures », au motif que le législateur aurait entendu viser le support papier.

    Il est souvent tiré argument des travaux parlementaires pour plaider en faveur d’une telle assimilation.

    En effet, ainsi que le relève le Conseil d’Etat dans son rapport « Internet et les réseaux numériques » « il ressort de l’examen des travaux parlementaires que le législateur souhaitait inclure dans [la] liste les messages adressés par Minitel ou par téléphone.

    Est-il dès lors possible d’assimiler Internet au Minitel et de considérer que l’interdiction de la publicité en faveur de l’alcool, qui pour l’essentiel concerne la télévision, ne vaut pas pour les services en ligne ? ».

    Selon nous, au lendemain de la consécration législative de l’écrit électronique en droit français, la réponse doit être affirmative.

    Pour plus d’informations :

    – L’ouvrage paru chez Litec : La protection juridique du cyber-consommateur.

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