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Pharmacie en ligne : les « bonnes pratiques » sont entrées en vigueur

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L’arrêté définissant les bonnes pratiques de dispensation des médicaments par voie électronique a été adopté le 20 juin 2013, et est entré en vigueur le 12 juillet dernier. L’adoption de ce texte met fin à certaines incertitudes peu confortables pour les pharmaciens. Passage en revue de quelques éléments essentiels.

Cet arrêté était attendu, dans le monde pharmaceutique français, avec une certaine impatience, depuis l’adoption le 19 décembre 2012 de l’ordonnance n°2012-1427 relative au renforcement de la sécurité de la chaîne d’approvisionnement des médicaments, à l’encadrement de la vente de médicaments sur internet et à la lutte contre la falsification de médicaments (voir notre article du 9 janvier 2013 en lien ci-dessous). Et pour cause, si cette ordonnance posait le principe de l’ouverture pour les pharmaciens de la possibilité de vendre des médicaments en ligne, ceux-ci n’avaient, jusqu’à lors, aucune certitude quant à la marge de manœuvre qui était la leur pour développer cette activité. Une telle marge de manœuvre devait en effet être définie dans le cadre de « bonnes pratiques » arrêtées par le Ministère de la Santé.

C’est donc désormais chose faite.

I. Présentation des bonnes pratiques

Avant tout, l’arrêté dispose que la dispensation des médicaments par voie électronique doit être réalisée selon les mêmes principes que la dispensation au comptoir. En particulier, l’arrêté prévoit que les « bonnes pratiques s’appliquent sans préjudice des règles déontologiques et professionnelles inscrites dans le code de la santé publique ». Outre ce rappel, les bonnes pratiques énoncent un ensemble de règles ayant trait à l’information du patient et encadrant l’activité de commerce électronique de médicaments.

II. La définition d’obligations d’information particulières

La définition de mentions légales obligatoires sur le site.

L’arrêté précise que l’officine pharmaceutique auquel se rattache le site internet de commerce électronique de médicament, ainsi que ses pharmaciens doivent être « clairement identifiés ». Dans cette optique, est indiqué un ensemble de mentions (la raison sociale de l’officine, les noms et prénoms de pharmaciens, l’adresse de l’officine, son adresse mail, son numéro de téléphone, etc.) devant figurer sur le site, et dont l’accès doit être « facile, direct et permanent ».

En outre, le site doit contenir certains liens hypertextes renvoyant vers les sites des autorités sanitaires (de l’Ordre national des pharmaciens, du Ministère chargé de la santé, ainsi que de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ci-après « ANSM »)), ainsi que le logo commun reconnaissable dans toute l’Union européenne.

L’obligation d’information sur le produit en vente.

Le médicament en vente sur le site internet doit être présenté « de façon claire, objective et non  trompeuse ». L’arrêté dresse une liste exhaustive des informations relatives au médicament qui doivent figurer sur le site (la dénomination du médicament, les indications thérapeutiques de l’autorisation de mise sur le marché, etc.). A cet égard, les lettres d’information concernant des médicaments sont autorisées pour autant qu’elles ne comportent que des informations émanant des autorités sanitaires. De plus, le site doit être conçu de telle sorte que la notice du médicament soit systématiquement affichée dans le processus de la commande, et consultée par le patient.

Enfin, le prix des médicaments vendus doit être affiché en euros, toutes taxes comprises, de manière claire lisible et non ambiguë pour le patient, et de manière identique pour tous les médicaments, sans artifice de mise en valeur. Il doit être indiqué que le prix ne comprend pas les frais de livraison, ceux-ci étant renseignés au moment de la commande.

L’obligation d’information contractuelle.

Les conditions générales de vente doivent être clairement présentées et facilement accessibles pour le patient. Celles-ci doivent être acceptées par le patient avant tout paiement.

Le devoir de conseil propre à la vente de médicament.

Le pharmacien, qu’il vende des médicaments sur Internet ou au comptoir, a un rôle d’information et de conseil. A cet égard, le site doit être conçu de façon à ce « qu’aucun médicament ne puisse être vendu sans qu’un échange interactif et pertinent ne soit rendu possible avant la validation de la commande ». Pour cela, notamment : (i) le patient doit remplir un questionnaire à destination du pharmacien avant toute commande, permettant au pharmacien de s’assurer de l’adéquation de la commande à l’état de santé du patient ; (ii) des techniques de communication favorisant un échange simultané et un dialogue pertinent doivent être mises en place.

III. L’encadrement de l’activité

Les limitations concernant les produits en vente.

Les médicaments pouvant être vendus en ligne sont les médicaments mentionnées à l’article L. 5125-34 du code de la santé publique, à savoir les seuls « médicaments de médication officinale qui peuvent être présentés en accès direct au public en officine, ayant obtenu l’autorisation de mise sur le marché mentionnée à l’article L. 5121-8 ou un des enregistrements mentionnés aux articles L. 5121-13 et L. 5121-14-1. » Toutefois, l’exécution de cette disposition a été suspendue provisoirement en référé par le Conseil d’Etat. Celui-ci, le 17 juillet dernier a confirmé sa position au fond, en annulant l’article 7 de l’ordonnance du 19 décembre 2012 en tant que l’article L. 5125-34 qu’il insère dans le code de la santé publique ne limite pas l’interdiction de commerce en ligne aux seuls médicaments soumis à prescription obligatoire. L’ensemble des médicaments non soumis à prescription peut donc, désormais, être vendu en ligne.

Par ailleurs, des quantités maximales de médicaments à délivrer sont définies et un système de blocage de quantités supérieures doit être prévu.

Les règles techniques concernant le site.

Le contenu du site doit être rédigé en langue française. Le site comporte un onglet spécifique à la vente de médicament, établissant une distinction claire par rapport aux autres produits vendus le cas échéant par le pharmacien.

Les interdictions posées.

Certaines techniques propres au commerce électronique sont formellement interdites comme les forums de discussion, la recherche de référencement dans des moteurs de recherche ou des comparateurs de prix contre rémunération. Par ailleurs,  sont interdits : les liens hypertextes vers les sites des entreprises pharmaceutiques ; la sous-traitance à un tiers de tout ou partie de l’activité de vente par internet, à l’exception de la conception et de la maintenance techniques du site, ne pouvant toutefois être confiées à une entreprise produisant ou commercialisant des produits de santé ; ainsi que le financement de la création et de l’exploitation du site, pour tout ou partie, par une entreprise produisant ou commercialisant des produits de santé.

L‘encadrement de la publicité.

Les bonnes pratiques rappellent que la publicité des médicaments est soumise à l’ensemble de la réglementation en vigueur.

Le cadre concernant la commande et la livraison, et leur suivi.

Les bonnes pratiques excluent le droit de rétractation en matière de vente de médicaments en ligne, ce qui doit être clairement précisé dans les conditions générales de vente.

La préparation de la commande doit se faire dans un espace adapté à cet effet, au sein de l’officine. Le médicament peut être délivré selon deux modalités : (i) soit la pharmacie se charge d’envoyer le médicament, sous la responsabilité du pharmacien, selon les règles réglementaires en vigueur sur la livraison à domicile ; (ii) soit le patient se déplace à l’officine pour se voir délivrer le médicament sur le site de l’officine.

Il incombe au pharmacien de contrôler effectivement et personnellement que le médicament  envoyé est bien le médicament commandé. Et, en cas d’erreur de délivrance, dans les hypothèses ou le patient reçoit un produit autre que celui commandé ou un produit détérioré, il le renvoie au pharmacien selon les modalités de remboursement et de réexpédition qui doivent être clairement décrites dans les conditions générales de vente.

La protection des données et la confidentialité.

Les données de santé sont des données qualifiées de sensibles et font à ce titre l’objet d’une protection renforcée. Notamment, l’hébergement de ces données ne peut se faire qu’auprès d’un hébergeur agréé, les correspondances entre le pharmacien et le patient font l’objet d’un chiffrement et les données sont conservées dans des bases de données garantissant la confidentialité, l’intégrité et la pertinence des informations collectées.

IV. Des bonnes pratiques moins restrictives qu’annoncé ?

Les bonnes pratiques risquent, lors de leur mise en œuvre, de se révéler extrêmement lourdes et coûteuses et, pour le dire franchement, parfois disproportionnées par rapport à l’objectif poursuivi.

Certes, entre le premier projet de « bonnes pratiques » et le texte final, la situation a été améliorée sur certains points. Par exemple, l’arrêté relatif aux bonnes pratiques admet la possibilité de vendre sur le même site des médicaments et d’autres produits, pour autant que soit intégré un onglet spécifique à la vente des médicaments, alors que le projet d’arrêté soumis à l’Autorité de la concurrence interdisait initialement la création de sites internet proposant à la fois des médicaments non soumis à prescription et d’autres produits. Egalement, l’obligation selon laquelle les pharmaciens devaient aligner leurs prix de vente sur internet avec ceux pratiqués en officine ne se retrouve plus dans l’arrêté publié. Enfin, les dispositions concernant le questionnaire de santé que devront remplir les patients avant de commander quelconque médicament sur internet semblent avoir été assouplies. L’arrêté n’impose plus que le patient remplisse le questionnaire à chaque nouvelle commande, mais seulement qu’il l’actualise le cas échéant.

Il reste qu’en dépit de ces allègements, le texte reste très contraignant.

Le risque ? Que les entrepreneurs français soient soumis à un cadre moins favorable que les concurrents étrangers, créant une "discrimination à rebours" comme l’a appelée l’Autorité de la concurrence. Et quand on sait le poids et la puissance de certains offreurs anglais, allemands ou néerlandais, il y a de quoi frémir.

L’arrêté relatif aux bonnes pratiques est entré en vigueur le 12 juillet dernier.

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