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Paiements électroniques : présentation de la loi du 17 juillet 2002

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La loi « relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de transfert électronique de fonds » a été adoptée le 17 juillet 2002. Cette loi transpose la recommandation européenne 97/489/CE du 30 juillet 1997 relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de paiement électronique, en particulier la relation entre émetteur et titulaire. La recommandation européenne…

La loi « relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de transfert électronique de fonds » a été adoptée le 17 juillet 2002. Cette loi transpose la recommandation européenne 97/489/CE du 30 juillet 1997 relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de paiement électronique, en particulier la relation entre émetteur et titulaire.

La recommandation européenne du 30 juillet 1997 (également disponible sur notre site) a été adoptée dans le but de parvenir à une confiance totale des utilisateurs dans les paiements électroniques, et d’assurer un degré élevé de protection des titulaires d’instruments de paiement. Le choix d’une recommandation – texte juridiquement non contraignant pour les Etats membres destinataires et les institutions visées – démontre la volonté de la Commission européenne de ne pas imposer de cadre strict pour la mise en œuvre des principes dictés, et de n’envisager l’adoption d’un texte contraignant qu’en cas d’échec dans la prise en compte du texte. En 2001, une étude a été réalisée à la demande de la Commission afin d’examiner de quelle façon les émetteurs d’instruments de paiement tenaient compte – ou non – des principes posés par la recommandation : le constat est édifiant, seul un pays (le Danemark) se conforme à la recommandation. Cela devrait logiquement amener la Commission à adopter une directive si elle veut voir les titulaires réellement protégés contre les pratiques des émetteurs…

En Belgique, le législateur avait choisi en 1999, lors de la transposition de la directive européenne relative aux contrats à distance (Directive 97/7/CE du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance.) dans la loi sur les pratiques du commerce (Loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur, M.B. 29 août 1991), d’intégrer une partie des dispositions de la recommandation : l’actuel article 81 § 5 reprend les principes de partage de responsabilité entre l’émetteur et le titulaire d’un instrument de paiement, principes qui constituent l’essentiel de la recommandation. Toutefois, devant les conséquences d’une transposition partielle (champ d’application plus restreint, bénéficiaires limités, etc.), le législateur a choisi de proposer une loi exclusivement dédiée aux paiements électroniques, reprenant l’ensemble des dispositions de la recommandation.

  1. Champ d’application de la loi

    La loi est relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de transfert électronique de fonds, et vise également les instruments rechargeables, communément appelés ‘porte-monnaie électronique’.

    1. Les instruments de transfert électronique de fonds
    2. Par ce terme, il faut entendre un moyen permettant d’effectuer une opération de transfert de fonds (paiement), un retrait ou un dépôt d’argent liquide, l’accès à distance à un compte bancaire, le chargement et le déchargement d’un porte-monnaie électronique (instrument rechargeable). Ces opérations peuvent se réaliser par voie partiellement ou entièrement électronique : ainsi le paiement peut être initié par un mode non électronique (empreinte papier d’une carte de crédit par exemple), pour autant que l’une des étapes du paiement est automatisée (ce qui est le cas pour les paiements par carte de crédit, même si l’initialisation n’est pas électronique), il sera couvert par la loi.

      Ainsi, les opérations de transfert électronique de fonds sont celles qui s’effectuent notamment à partir de :

      – terminaux points de vente,

      – distributeurs automatiques,

      – téléphone (application de phone banking),

      – ordinateur (application home banking et internet banking),

      – dispositifs mis en place par l’émetteur (self banking).

      Les instruments utilisés pour effectuer ces opérations sont notamment les cartes de débit, cartes de crédit, cartes à puce, systèmes de banque à domicile, par internet ou par téléphone.

    3. Le porte-monnaie électronique : l’instrument rechargeable

      L’instrument rechargeable est une sous-catégorie des instruments de transfert électronique de fonds. Il permet de stocker électroniquement des unités de valeur sur un support tel qu’une carte (carte Proton) ou un ordinateur. Pour être couvert par la loi, l’instrument doit être rechargeable : les instruments utilisables pour un service donné et/ou une période précise, et/ou une somme fixe pré-chargée ne sont pas visés. Par contre, la loi ne cherche à réglementer que les instruments qui permettent une utilisation multi-prestataire, et ce afin de ne pas couvrir les instruments utilisables auprès d’un seul prestataire (par exemple une carte de photocopie rechargeable utilisable dans une bibliothèque).

      Cette sous-catégorie revêt une importance particulière car, suivant l’utilisation qui est faite de l’instrument, le régime juridique applicable sera différent. L’instrument rechargeable peut en effet être utilisé dans deux fonctions différentes :

      – la fonction chargement ou déchargement via accès au compte : le titulaire de l’instrument charge ou décharge des unités via accès à son compte ;

      – la fonction déchargement sans accès au compte, c’est-à-dire que les unités sont utilisées auprès de commerçants pour l’achat de biens.

      On verra que les dispositions de la loi s’appliquent différemment suivant que l’instrument est utilisé dans sa fonction chargement ou déchargement avec ou sans accès au compte bancaire, avec une protection accrue dès lors qu’il y a accès au compte.

    4. Emetteur et titulaire

      Les émetteurs visés par la loi sont ceux qui, dans le cadre d’une activité commerciale, mettent un instrument de transfert électronique de fonds (ci-après instrument de TEF) à la disposition d’un titulaire, moyennant un contrat conclu entre les parties. Les banques ne sont pas les seules visées : les commerçants mettant à la disposition de leurs clients de tels instruments sont également considérés comme émetteur et doivent respecter les obligations du texte (Par exemple les grandes surfaces et les cartes de crédit qu’elles proposent, les cartes essence, etc.).

      Le titulaire est toute personne physique qui détient un instrument de TEF. Les personnes morales sont exclues de la protection.

    5. Les exclusions

      Les opérations suivantes sont exclues du champ d’application :

      – les transferts de fonds réalisés par chèque ou lettre de change,

      – les transferts de fonds réalisés par instrument rechargeable mono prestataire, sans accès direct à un compte bancaire,

      – les transferts de fonds réalisés suite à un virement, un ordre de paiement ou une domiciliation effectuée manuellement.

      Enfin, certaines dispositions ne sont pas applicables aux instruments rechargeables utilisés dans leur fonction déchargement sans accès au compte. Il s’agit des dispositions suivantes :

      – l’obligation faite à l’émetteur de fournir un relevé périodique des opérations : une obligation spécifique est prévue pour les instruments rechargeables puisque l’émetteur doit fournir au titulaire la possibilité de vérifier au moins les cinq dernières opérations effectuées à l’aide de l’instrument, ainsi que la valeur résiduelle stockée sur l’instrument,

      – l’obligation de conserver un relevé interne des opérations pendant une période de 5 ans,

      – l’obligation d’empêcher toute nouvelle utilisation de l’instrument après la notification de la perte ou du vol,

      – la responsabilité de l’émetteur en cas d’inexécution ou d’exécution incorrecte des opérations à partir de dispositifs ou terminaux agréés par l’émetteur, que ceux-ci soient sous son contrôle ou non,

      – la responsabilité de l’émetteur pour les opérations effectuées sans l’autorisation du titulaire ainsi que pour les erreurs ou irrégularités commises dans la gestion du compte,

      – l’obligation pour le titulaire de notifier toute irrégularité imputée sur son relevé, ainsi que toute erreur ou irrégularité.

  2. L’information du titulaire d’un instrument de transfert électronique de fonds (TEF)

    La loi se concentre sur un élément essentiel de la relation entre l’émetteur et le titulaire qui est la bonne information de ce dernier, à la fois avant la remise d’un instrument de paiement, puis au fur et à mesure de son utilisation.

    1. Informations avant la conclusion du contrat

      Au moment de la remise d’un instrument de TEF (avant la conclusion du contrat ou au plus tard au moment de la conclusion), le titulaire doit recevoir au minimum les informations suivantes :

      – les conditions contractuelles régissant l’émission et l’utilisation de l’instrument,

      – une description de l’instrument et de ses caractéristiques techniques,

      – les utilisations possibles de l’instrument, y compris les utilisations à l’étranger,

      – les plafonds éventuellement appliqués,

      – dans le cas d’une carte (Instrument de transfert électronique de fonds dont les fonctions sont supportées par une carte – définition donnée à l’article 2), les plafonds correspondant aux besoins propres du titulaire que ce dernier peut choisir,

      – les obligations et responsabilités respectives des parties, ainsi qu’une description des mesures de prudence que doit prendre le titulaire dans l’utilisation de son instrument,

      – les conditions et modalités d’exercice de la notification que le titulaire doit effectuer en cas de perte ou vol de l’instrument,

      – le délai de débit ou de crédit du compte du titulaire ainsi que la date de valeur,

      – les frais à charge du titulaire,

      – les conditions et modalités de contestation d’une opération, y compris l’adresse où envoyer une plainte.

      Par ailleurs, l’émetteur doit remettre gratuitement au titulaire un document résumant toutes ces informations : cette exigence résulte de la difficulté pratique de lire toutes les informations mentionnées ci-dessus, d’autant que l’étude réalisée au niveau européen a montré que rares sont les émetteurs qui délivrent les conditions générales régissant un instrument de TEF au moment où le titulaire en devient acquéreur. Ainsi, à défaut d’être en possession de tout le détail des informations (que les titulaires lisent rarement, il est vrai), le titulaire devrait pouvoir au minimum accéder à une version résumé reprenant les informations essentielles.

    2. Informations à fournir au titulaire après la remise de l’instrument

      Périodiquement, l’émetteur doit fournir un relevé des opérations effectuées avec l’instrument : ce sont les extraits de compte tels qu’on les connaît actuellement. La régularité est laissée à l’appréciation de l’émetteur, le tout est de permettre au titulaire de suivre régulièrement ses dépenses.

      Les informations doivent contenir au minimum :

      – la date de l’opération et la date de valeur, une identification de l’opération,

      – le montant débité du compte,

      – le montant des commissions et frais appliqués.

      Périodiquement, l’émetteur doit fournir des conseils de prudence destinés à éviter tout usage abusif de l’instrument et des moyens qui en permettent l’utilisation. Cette dernière précision est importante puisque l’instrument n’est pas le seul à devoir être protégé par le titulaire : les « moyens qui en permettent l’utilisation » sont tout autant importants. Pour exemple, le numéro apparent de la carte de crédit, couplé à la date d’expiration de la carte qui est elle aussi apparente, permet de réaliser des paiements à distance, sans nécessiter la possession de la carte. Le titulaire doit être bien conscient de cette réalité.

      En ce qui concerne les instruments rechargeables, l’émetteur doit permettre au titulaire de vérifier les cinq dernières opérations réalisées à l’aide de son instrument, ainsi que la valeur résiduelle. Cette obligation est déjà en pratique avec la carte Proton puisque, sur demande et gratuitement, la banque fournit un petit appareil qui permet de lire la puce et de connaître la date et le montant des cinq dernières opérations, et le solde restant.

      Enfin, une information particulière doit être donnée concernant la modification unilatérale du contrat par l’émetteur : il doit informer le titulaire qu’il dispose d’un délai de deux mois à partir de la notification de la modification pour éventuellement la refuser (la modification n’est applicable qu’à l’expiration de ce délai de deux mois). La période prévue doit permettre au titulaire qui refuserait les modifications de faire les démarches nécessaires auprès d’un autre émetteur pour obtenir un instrument de TEF. Si, dans ce délai, le titulaire ne se manifeste pas, il est réputé avoir accepté les nouvelles conditions. Notons que cette disposition est prise par dérogation à l’article 32 § 9 de la loi sur les pratiques du commerce selon lequel est réputée abusive une clause « qui autorise le vendeur à rompre ou modifier le contrat unilatéralement sans dédommagement pour le consommateur (…) ». Cette dérogation est supposée balancée par la possibilité octroyée au consommateur de réfuter la modification pendant un délai de deux mois. Enfin, ce délai de deux mois n’est pas applicable dès lors que l’information en cause est relative à une modification du taux d’intérêt débiteur : le titulaire doit seulement en être informé, mais il ne dispose pas de la possibilité de s’y opposer.

  3. Les obligations et responsabilités de l’émetteur

    1. Obligations de l’émetteur

      L’émetteur doit :

      – garantir secret le numéro d’identification personnel : il s’agit d’une véritable obligation de résultat à charge de l’émetteur qui doit prendre toutes les mesures nécessaires pour que la confidentialité du code soit maintenue ;

      – supporter les risques de tout envoi au titulaire d’un instrument de TEF, ou des moyens qui en permettent l’utilisation,

      – ne pas fournir un instrument de TEF non sollicité par le titulaire, sauf s’il s’agit du renouvellement d’un instrument existant (La fourniture non sollicitée n’est pas seulement théorique : le meilleur exemple en est la fonction Proton qui est ajoutée à la carte Mistercash/Bancontact par certaines banques, sans information ni demande préalables des titulaires, et dont la première utilisation est facturée au titulaire),

      – conserver un relevé interne des opérations, pendant cinq ans au minimum : la durée correspond aux exigences en matière de blanchiment de capitaux (Loi du 11 janvier 1993 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux, M.B. 9 février 1993),

      – mettre à la disposition du titulaire tous les moyens pour effectuer la notification en cas de perte ou de vol de son instrument : cela signifie que l’émetteur doit mettre en place un système permettant d’effectuer la notification 24 heures sur 24. De plus, il doit fournir au titulaire un moyen de prouver la notification, notamment lorsqu’elle a lieu par téléphone (tel un numéro de dossier),

      – dans le cadre d’une carte, l’émetteur doit, à la demande du titulaire, modifier les plafonds d’utilisation de son instrument de TEF,

      – empêcher toute nouvelle utilisation de l’instrument dès la notification du titulaire : à noter que cette obligation s’applique même en cas de fraude du titulaire. La loi fait peser ici une obligation du résultat sur l’émetteur qui est bien le seul en mesure de stopper l’utilisation de l’instrument ;

      – en cas de contestation d’une opération par le titulaire, l’émetteur doit apporter la preuve que l’opération a été correctement enregistrée et comptabilisée (Cette obligation n’est applicable qu’à la condition que le titulaire informe l’émetteur de l’opération litigieuse endéans les trois mois).

    2. Responsabilités de l’émetteur

      La responsabilité de l’émetteur porte sur :

      – l’inexécution ou l’exécution incorrecte des opérations effectuées à l’aide d’un instrument de TEF, à partir de dispositifs, terminaux ou d’équipements agréés par l’émetteur ;

      – les opérations effectuées sans l’autorisation du titulaire, toute erreur ou irrégularité commise dans la gestion du compte et imputable à l’émetteur,

      – en cas de contrefaçon de l’instrument, de l’usage de l’instrument contrefait.

      Dès lors que sa responsabilité est engagée, l’émetteur doit rembourser au titulaire :

      – le montant de l’opération non exécutée ou incorrectement exécutée, éventuellement augmenté d’intérêts,

      – la somme éventuellement nécessaire pour rétablir le titulaire dans la situation antérieure (obligation valable également en cas de contrefaçon),

      – tout autre conséquence financière éventuelle,

      – pour l’instrument rechargeable : la perte de toute valeur stockée ou l’exécution incorrecte des opérations par le titulaire, lorsque la perte ou l’exécution incorrecte est due à un dysfonctionnement de l’instrument, du dispositif, du terminal ou de tout autre équipement agréé par l’émetteur. L’émetteur n’est pas responsable si les opérations sont effectués par un tiers, ou si le titulaire a provoqué lui-même le dysfonctionnement.

  4. Les obligations et responsabilités du titulaire

    1. Ses obligations

      Deux obligations principales sont imposées au titulaire. D’abord, une obligation générale d’utiliser son instrument en « bon père de famille », en respectant les conditions d’utilisation telles que fournies par l’émetteur. Cela implique bien évidemment de ne pas communiquer le code secret qui permet l’utilisation de l’instrument, mais aussi d’assurer une sécurité minimale de l’instrument et des moyens qui en permettent l’utilisation.

      Ensuite, l’obligation de notifier dès que possible à l’émetteur tout ‘incident’ survenu dans l’utilisation de son instrument de TEF. La notification doit avoir lieu dans les cas suivants :

      – perte ou vol de d’instrument ou des moyens qui en permettent l’utilisation,

      – imputation sur le relevé ou les extraits de compte d’opérations effectuées sans l’accord du titulaire,

      – toute erreur ou irrégularité constatée sur les relevés ou extraits de compte.

      Enfin, le principe d’irrévocabilité des instructions de paiement est posé, interdisant au titulaire de révoquer un transfert de fonds effectué à l’aide de son instrument (hors cas visés par la notification). Toutefois, ce principe connaît une exception dans les cas où le montant de la transaction n’est pas connu au moment où l’instruction est donnée, ce qui est le cas notamment lorsque l’empreinte de la carte de crédit est prise en garantie d’une location, sans que le montant ne soit mentionné.

    2. Ses responsabilités

      Les règles concernant la responsabilité du titulaire sont réparties en deux catégories articulées autour de la notification :

      • Avant la notification

        Le principe est que la responsabilité du titulaire est limitée à un plafond de 150 euros, sauf dans le cas où le titulaire aurait agi avec une négligence grave ou frauduleusement, auquel cas aucun plafond n’est applicable (Par négligence grave on entend notamment le fait de noter son code PIN sur l’instrument).

        Il est précisé que la négligence ne peut se présumer sur le simple fait que le code PIN de l’instrument a été utilisé par un tiers. Cette situation, très favorable aux titulaires, est largement critiquée par les émetteurs qui invoquent l’impossibilité d’apporter la preuve de la négligence du titulaire autrement que par présomption. D’un autre côté, la situation actuelle qui consiste à faire jouer cette présomption pour accabler le titulaire n’est pas équitable puisque l’on sait que les fraudeurs parviennent à trouver les codes PIN sans pour autant que le titulaire ait été négligent. Entre les intérêts des titulaires et ceux des émetteurs, le législateur a tranché …

      • Après la notification

        Le titulaire n’est plus responsable des conséquences liées à la perte ou au vol de l’instrument, sauf s’il a agi frauduleusement. On note que la négligence n’est pas reprise ici : si elle est établie, elle n’a de conséquence pour le titulaire qu’avant la notification. Ainsi, la responsabilité des opérations effectuées après la notification repose sur l’émetteur, qui est le seul à pouvoir bloquer l’utilisation de l’instrument.

      • Régime concernant l’instrument rechargeable

        Un régime dérogatoire est prévu pour l’instrument rechargeable. En cas de perte ou de vol, l’émetteur n’est pas responsable de la perte de la valeur stockée sur l’instrument, pour autant que la valeur susceptible d’être stockée sur l’instrument rechargeable soit limitée à 125 euros. Les risques liés à une perte ou un vol reposent donc sur le titulaire, ce qui est dans la logique de l’assimilation du porte-monnaie électronique à des pièces et billets stockés dans un porte-monnaie ‘traditionnel’.

        La limite des 125 euros fait directement référence à la limite actuelle de la carte Proton : le législateur considère que tant que le montant maximum qui peut être stocké sur la carte est limité à 125 euros, il est acceptable que le titulaire assume les risques en cas de perte. Au delà de 125 euros, le risque devient plus important et l’on demande à l’émetteur de sécuriser l’instrument rechargeable.

      • Dérogation

        La célèbre dérogation de la recommandation européenne est reprise dans la loi, dans une formulation quasi-identique : par dérogation aux règles de répartition de responsabilité, « la responsabilité du titulaire n’est pas engagée si l’instrument de transfert électronique de fonds a été utilisé sans présentation physique et sans identification électronique. La seule utilisation d’un code confidentiel ou de tout autre élément d’identification similaire n’est pas suffisante pour engager la responsabilité du titulaire ». En clair, dans le cadre d’un paiement à distance (utilisation de l’instrument « sans présentation physique ») si l’instrument est utilisé sans identification électronique, le titulaire n’est pas responsable des opérations.

        Principalement, cette disposition vise à faire échec aux pratiques de paiements à distance consistant à transmettre le numéro apparent d’une carte de crédit et sa date d’échéance. La sécurité d’un tel paiement est nulle puisque toute personne peut effectuer le paiement dès lors que le numéro est connu.

        Que faut-il entendre par identification électronique ? L’exposé des motifs parle de la lecture d’un instrument de TEF dans un terminal : ce peut être par exemple la lecture de la carte par un lecteur ad hoc intégré à l’ordinateur, lecture qui est couplée à la réalisation d’un code confidentiel. Dans ce cas, l’instrument est identifié électroniquement, et le code confidentiel n’est pas le seul élément de sécurité utilisé.

        On note cependant ce qui a tout lieu d’être un oubli du législateur : que se passe-t-il en cas de fraude du titulaire ? Ne mentionnant pas la fraude, la dérogation semble couvrir toutes les hypothèses, alors qu’il aurait semblé logique de limiter la responsabilité de l’émetteur aux seules opérations non entachées par la fraude du titulaire.

  5. Les sanctions du non-respect de la loi

    1. Les sanctions civiles

      Toute clause par laquelle le titulaire renoncerait à ses droits est interdite et nulle de plein droit. De même, toute clause par laquelle l’émetteur est exonéré, entièrement ou partiellement, de ses obligations, est également interdite et nulle. Cette dernière précision est importante, puisque par une formulation générale (« toute clause »), le législateur a cherché délibérément à interdire à l’émetteur de se décharger de sa responsabilité sur les commerçants victimes de l’utilisation d’instruments de TEF par des tiers non autorisés.

    2. Les sanctions pénales

      Sont punis d’une amende de 500 à 20.000 euros :

      – ceux qui commettent une infraction de mauvaise foi à la loi,

      – ceux qui ne se conforment pas aux dispositions d’un jugement ou d’un arrêt.

      L’action en cessation est également possible.

  6. Lien avec la loi sur les pratiques du commerce

    Comme mentionné précédemment, la loi sur les pratiques du commerce contient en son article 81 § 5 une transposition partielle de la recommandation. La présente loi prévoit une nouvelle rédaction pour cet article, afin de tenir compte de la directive européenne relative aux contrats à distance et de son article 8 relatif aux paiements par carte.

    Nouvel article 81 § 5 : en cas d’utilisation frauduleuse d’un instrument de TEF ou d’un instrument rechargeable (dont la valeur susceptible d’être stockée est supérieure à 125 euros), dans les conditions de la dérogation (article 8 § 4 de la loi), le consommateur peut demander l’annulation du paiement, sauf s’il a agi lui-même frauduleusement. En cas d’annulation, l’émetteur doit rembourser le consommateur dans les plus brefs délais.

    L’article 8 de la directive relative aux contrats à distance demandait aux Etats membres de prendre les mesures appropriées pour que le consommateur puisse « demander l’annulation d’un paiement en cas d’utilisation frauduleuse de sa carte de paiement », et qu’il soit « recrédité des sommes versées en paiement ou se les voie restituées ».

    Le nouvel article 81 § 5 cherche à transposer fidèlement l’article 8 de la directive (ce qui n’est pas le cas de l’actuel article qui transpose en partie la recommandation), tout en gardant la cohérence avec la présente loi. Ainsi retrouve-t-on les exigences d’annulation et de remboursement, mais dans le cadre de la dérogation prévue à l’article 8 § 4 de la loi, c’est-à-dire l’utilisation de l’instrument de TEF sans présentation physique et sans identification électronique.

  7. Conclusion

    la loi du 17 juillet 2002 a pour mérite de clarifier la relation entre émetteur et titulaire d’instruments de transfert électronique de fonds. La volonté politique du texte de protéger les titulaires ne cache pas la situation peu enviable des émetteurs, mais il a semblé opportun au législateur de mettre fin à la situation actuelle où le titulaire se trouve démuni face à un émetteur qui définit les règles en son avantage.

    Enfin, signalons qu’un large processus de consultation a été lancé au niveau européen en mai 2002 sur « un possible cadre juridique pour l’espace unique de paiement dans le marché intérieur », qui englobe le domaine des instruments de transfert électronique de fonds. De cette consultation pourrait résulter un instrument législatif plus large dans lequel les principes de la recommandation de 1997 seraient repris. Le législateur belge devra s’assurer que son texte reste conforme aux principes européens.

  8. Plus d’infos

    En prenant connaissance de la loi, en ligne sur notre site.

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