Nouveau dossier en ligne : plaidoyer pour un cadre juridique général relatif aux tiers de confiance
Publié le 14/06/2005 par Didier Gobert
Le cadre enchanteur du commerce électronique, et l’apparence de liberté qui en découle, ne doit pas faire oublier que la confiance dans les relations humaines a souvent été bâtie au gré des rencontres entre partenaires potentiels et suite à la formalisation de leurs engagements éventuels sur un support papier – difficilement altérable – revêtu de…
Le cadre enchanteur du commerce électronique, et l’apparence de liberté qui en découle, ne doit pas faire oublier que la confiance dans les relations humaines a souvent été bâtie au gré des rencontres entre partenaires potentiels et suite à la formalisation de leurs engagements éventuels sur un support papier – difficilement altérable – revêtu de notre « bonne veille » signature manuscrite, envoyé le cas échéant par lettre recommandée déposée à La Poste et remise en mains propres par l’agent de La Poste. Il convient donc de maintenir un tel climat de confiance dans un monde virtuel dans lequel les parties ne se voient ni ne s’entendent et dans lequel l’aspect immatériel des échanges pose la question du caractère bien réel de ceux-ci, particulièrement dans les réseaux ouverts à tout venant.
Dans ce contexte, il est rapidement apparu nécessaire de développer des techniques permettant de gagner la confiance des utilisateurs afin d’assurer le développement harmonieux des échanges au sein des réseaux virtuels. Ces diverses techniques impliquent généralement l’intervention d’un tiers dont le métier est précisément de mettre en œuvre tous les moyens techniques afin de créer un contexte dans lequel les parties peuvent établir des échanges en toute sécurité. Dans le cadre de l’utilisation de signatures électroniques, ce tiers de confiance est appelé « prestataire de service de certification » (ci-après « PSC »).
Le législateur européen, repris en chœur par les législateurs nationaux, a manifestement estimé que la confiance devait se mériter, ce qui a justifié l’adoption d’un régime juridique spécifique applicable aux activités des prestataires de service de certification. Ledit régime est établi par la directive européenne du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, transposée en droit belge par la loi du 9 juillet 2001 fixant certaines règles relatives au cadre juridique pour les signatures électroniques et les services de certification.
A l’analyse de cette législation, on constate que son champ d’application est limité à l’intervention du tiers de confiance dans le cadre de l’utilisation de signatures électroniques et de certificats d’identité. Or, lorsqu’on envisage la conclusion, la transmission et la conservation d’un acte juridique dans un processus totalement électronique, il devient difficile de s’affranchir d’une réflexion plus large sur les conditions que devraient remplir les tiers de confiance dans le cadre de l’offre d’autres services, tels le recommandé électronique, l’archivage électronique, le blocage transitoire des sommes dans le cadre de l’application de l’article 80, § 3, de la loi sur les pratiques du commerce, etc.. Ces conditions permettraient de garantir la fiabilité de ces services mais aussi d’assurer la reconnaissance juridique de ceux-ci.
On ne voit pas, en effet, ce qui justifie que l’on n’exige aucun niveau minimum de fiabilité en matière de recommandé électronique ou d’archivage électronique alors que l’on exige le respect de garanties techniques et juridiques minimales en vue d’assimiler une signature électronique à une signature manuscrite, et de lui reconnaître ainsi la même force probante. Or, sur le plan juridique, il est tout aussi important de disposer de moyens de preuve « solides » en vue de convaincre le juge de la réalité et de la date d’un envoi mais aussi de la non altération du document malgré l’écoulement du temps. Si le respect de garanties minimales n’est pas imposé aux opérateurs de ces services, des discussions techniques et délicates à trancher naîtront inévitablement devant le juge à convaincre, ce qui crée une insécurité juridique certaine. A juger de la piètre qualité des services offerts par certains opérateurs, exiger un niveau minimum de fiabilité et de sérieux ne semble en outre pas superflu. Raisonner autrement reviendrait à laisser croire aux utilisateurs qu’ils disposent de moyens de preuve électroniques (rarement gratuits)… qui en pratique risquent de ne rien prouver ! Il convient dès lors de lever l’incohérence légale et de supprimer ce régime discriminatoire sur le plan probatoire qui existe actuellement dans notre droit.
Dans ce contexte, cette contribution se propose d’analyser l’opportunité, d’une part, d’élargir le champ d’application de la loi du 9 juillet 2001 en vue d’établir un régime juridique général qui couvre l’offre de services de recommandé électronique, d’archivage électronique voire de blocage transitoire des sommes dans le cadre de l’application de l’article 80, § 3, de la loi sur les pratiques du commerce et, d’autre part, de consacrer – pour chacun de ces services – une clause d’assimilation comparable à la clause d’assimilation existante en matière de signature électronique.
Le dossier est accessible en cliquant ici.