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Négocier les contrats dans le monde sportif : tout un art !

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La Coupe du Monde de Football terminée, les opérateurs agréés de paris sportifs vont désormais se concentrer sur la reprise des différents championnats nationaux en vue d’alimenter leur offre de jeux en ligne. Cela signifie : négocier des contrats. Un exercice délicat auquel le monde sportif est habitué.

Néanmoins, à la différence du deuxième plus grand événement sportif planétaire, les opérateurs vont devoir faire face en France à une contrainte supplémentaire, à savoir la contractualisation du droit au pari. Pour rappel, la loi n°2010-476 du 12 mai 2010 impose aux opérateurs agréés d’obtenir le consentement de l’organisateur sportif pour pouvoir proposer des paris sur les manifestations sportives qu’il organise sur le territoire français dans un souci de préservation de l’intégrité sportive et de l’équité du jeu.

En réalité, nombre d’opérateurs de jeux en ligne sont déjà confrontés depuis quelques semaines à la dimension du droit au pari puisque des compétitions sportives comme le Tour de France de cyclisme ou encore la rencontre de Coupe Davis de tennis opposant la France à l’Espagne nécessitent, pour pouvoir faire l’objet de paris, un rapprochement contractuel certain entre l’organisateur et l’opérateur.

Si en théorie la contractualisation d’un droit au pari paraît être une simple formalité, la pratique démontre que cela tourne rapidement à un rapport de force largement emporté par les organisateurs sportifs. En effet, la prise de connaissance des premiers cahiers des charges des organisateurs sportifs semblent avoir laissé perplexe la plupart des opérateurs de jeux en ligne qui, face à une négociation quasiment inexistante avec les organisateurs surtout lorsqu’un des opérateurs a déjà apposé sa signature sur le fameux contrat, y voient un obstacle conséquent pour l’exercice de leur activité.

Dés lors, il y a lieu de s’interroger sur les procédés légaux existants qui permettraient de remédier à une telle situation de blocage. Au passage, il convient de signaler que la mésentente entre les opérateurs et les organisateurs a un impact nécessairement néfaste sur la politique de lutte contre les sites illégaux menée par l’ARJEL. Par le biais de communiqués, des opérateurs agréés ont déjà affirmé leur volonté de ne pas contractualiser de droit au pari pour certaines compétitions en raison des conditions particulièrement discriminatoires résultant de la consultation de l’organisateur. Autant dire que cela renforce l’intérêt des joueurs français pour des sites de jeux offrant une panoplie importante de paris qui, à l’heure actuelle, constituent généralement des sites qui ne sont pas en conformité avec le nouveau régime juridique.

Les procédés spécifiques de la loi du 12 mai 2010. La loi libéralisant les jeux en ligne en France n’a offert aucun moyen aux opérateurs de jeux en ligne pour contester directement la mise en œuvre de la consultation du droit au pari par les organisateurs sportifs. Les opérateurs peuvent seulement s’en remettre aux avis rendus par l’ARJEL et par l’Autorité de la concurrence sur le projet de contrat devant les lier avec l’organisateur quoique la pratique en décide autrement. En effet, les projets de contrat transmis aux deux autorités administratives indépendantes ne sont autre que les cahiers des charges qui ont été élaboré de manière unilatérale par les organisateurs. En conséquence, à aucun moment le point de vue des opérateurs n’est pris en compte dans le cadre de ce contrat alors que pourtant celui-ci est prépondérant au regard de la nature du contrat. Il faut avoir à l’esprit que le contrat de droit au pari a pour objet exclusif de déterminer les modalités indispensables à la détection et la prévention de la fraude. L’opérateur n’est-il pas le mieux placé pour fixer de telles modalités ou du moins une concertation préalable entre les parties n’est-elle pas essentielle pour éviter de mettre en place des outils redondants ou inefficaces ? En outre, les avis rendus par les autorités administratives sont seulement des avis obligatoires en ce sens que l’avis doit être impérativement sollicité mais que l’organisateur n’a pas l’obligation de le suivre.

Il reste que, face à ce contrôle relatif de la mise en œuvre du droit au pari, un pouvoir important est octroyé à l’ARJEL par l’article 39 I de la loi du 12 mai 2010. Ce dernier précise que « le Président de l’ARJEL saisit l’Autorité de la concurrence des situations susceptibles d’être constitutives de pratiques entravant le libre exercice de la concurrence dont il a connaissance dans le secteur des jeux en ligne, notamment lorsqu’il estime que ces pratiques sont prohibées par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code du commerce, l’article 25 de la présente loi ou les articles L. 333-1-1 et L. 333-1-2 du code du sport ». La rédaction de cet article ne laisse aucun doute sur le devoir, si ce n’est l’obligation, de l’ARJEL de saisir l’Autorité de la concurrence lorsqu’elle est confrontée, de par l’avis qu’elle doit rendre, à un cahier des charges de droit au pari qui est de nature à entraver le libre jeu de la concurrence.

Les procédés de droit commun. Par procédé de droit commun, il convient d’entendre les outils qui sont offerts à tout justiciable et qui ne sont pas uniquement réservés aux acteurs du secteur des jeux en ligne. Tout d’abord, les opérateurs de jeux en ligne peuvent envisager de saisir l’Autorité de la concurrence conformément aux prescriptions du code de commerce et notamment sur le fondement des articles L. 462-5 II et L. 464-1 de ce code. En somme, l’Autorité de la concurrence a la possibilité de s’autosaisir pour régler le différend lié au droit au pari sur le fondement de l’article L. 462-5 III du code de commerce. Cela pourrait être la résultante de l’avis qu’elle doit donner sur le cahier des charges d’un organisateur sportif. Ensuite, les opérateurs de jeux en ligne peuvent également décider de s’en remettre aux juridictions de l’ordre judiciaire voire administratif. A cet égard, la technique du référé est parfaitement adaptée à la situation dans laquelle se trouvent les opérateurs de jeux en ligne lorsqu’ils doivent contractualiser un droit au pari dans des délais qui ne leur sont pas réellement favorables. A titre d’illustration, les opérateurs de jeux en ligne pourraient intenter une action en référé contre un organisateur sportif conformément à l’article 808 du code de procédure civile lequel permet au président du TGI, dans tous les cas d’urgence, de pouvoir ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. Tel est le cas par exemple d’une impossibilité pour un opérateur de jeux en ligne de proposer des paris sur une manifestation sportive en raison des conditions excessives et discriminatoires imposées par le cahier des charges de l’organisateur. De même, les référés administratifs ne sont pas à exclure dans la mesure où la plupart des organisateurs d’événements sportifs en France ont reçu, pour ce faire, une délégation de service public de l’Etat. En ce sens, le référé-liberté prévu à l’article L. 521-2 du code de justice administrative semble une solution adéquate lorsque l’opérateur doit contractualiser le droit au pari avec une fédération sportive délégataire telle que la Fédération Française de Football, la Fédération Française de Rugby ou encore la Ligue de Football Professionnel. Dans ce cas, le juge des référés se prononce dans un délai de 48h afin d’ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale – en l’occurrence la liberté du commerce et de l’industrie, la liberté d’entreprendre – à laquelle un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale.

Ainsi, face aux velléités des organisateurs sportifs qui cherchent notamment à fixer, à travers le droit au pari, des obligations qui vont bien au-delà de la simple lutte contre la fraude et l’atteinte à l’intégrité sportive, les opérateurs agréés de paris sportifs en ligne ne sont pas totalement dénués d’outils. Il reste qu’il aurait été préférable que la loi pose les garde-fous nécessaires pour éviter que la lutte contre la fraude se fasse à travers un droit dont les conditions de concession empêchent les opérateurs d’exercer leur métier et les obligent à recourir « déjà » à l’outil juridictionnel.

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