L’Europe aime les start-ups : des milliards pour booster l’innovation
Publié le 22/11/2016 par Etienne Wery
C’est un plan d’action à plusieurs milliards d’euros que la commission européenne ambitionne de mettre en ouvre d’ici 2017. En rassemblant toutes les aides éparpillées actuellement, en modifiant certaines réglementations et en créant un fonds de financement dédié aux start-up, l’Europe veut aider ses entrepreneurs à créer leur entreprise, mais aussi à la développer au sein de l’Union.
Un constat de semi-échec
Toute la réflexion part d’un constat : en Europe, on a des idées et du talent. Par contre, transformer ces idées et ce talent en initiative commerciale, et au bout du compte en argent, n’est pas ce que l’Europe fait de mieux. Qu’il s’agisse des États-Unis, d’Israël, de la Corée du Sud ou de certaines régions d’Inde, on ne compte plus les hot spots dans le monde qui offrent aux start-up un cadre économique et juridique propre à stimuler la création de l’entreprise, mais surtout son développement.
Il faut bien dire que comme avocat, on constate régulièrement avec une certaine tristesse que les meilleurs projets ont une fâcheuse tendance à traverser l‘océan Atlantique dès qu’ils sont identifiés comme potentiellement rentables. Les nouveaux investisseurs, souvent américains, souhaitent déménager aux États-Unis la propriété intellectuelle, le centre de décision et les éléments stratégiques de la start-up. Immergée dans un monde de start-up, la nouvelle venue tisse très rapidement des liens. Les choses vont simplement plus vite. Au bout de quelques mois, la valeur est démultipliée (ce qui conforte les investisseurs de départ dans leur choix), mais sur le plan macro-économique l’Europe a perdu une pépite de plus.
À cela s’ajoute une question de mentalité. En Europe, une start-up qui met la clé sous le paillasson est bien souvent synonyme d’infamie pour les actionnaires et animateurs de la société. Ils ont échoué. La mentalité est fondamentalement différente de l’autre côté de l’Atlantique, où l’échec est simplement une opportunité d’apprendre. Et puis, comme le disent les Américains avec leur incomparable pragmatisme : seuls ceux qui essaient échouent parfois.
Enfin, il y a l’accès au crédit et aux fonds. Lorsqu’on est riche et en bonne santé, il faut déjà se mettre tout nu devant son banquier pour obtenir un crédit. Alors imaginez un jeune entrepreneur de moins de 30 ans, qui a une super-idée, mais pas d’argent et aucune connaissance des codes en vigueur au sein du monde du financement des entreprises. Et si cet entrepreneur a le malheur d’avoir déjà lancé une société sans succès deux ans plus tôt, le crédit et les fonds lui sont pratiquement fermés. Il n’a plus qu’à s’expatrier s’il veut poursuivre.
La commission européenne ne dit pas autre chose même si elle l’habille d’une couche de vernis : « L’Europe ne manque ni d’idées innovantes ni d’esprit d’entreprise, mais de nombreuses nouvelles entreprises ne survivent pas à la phase critique des premières années d’existence ou tentent leur chance dans un pays tiers au lieu de tirer parti d’un réservoir de 500 millions de clients potentiels dans l’Union. La Commission européenne est déterminée à changer cette situation et à aider les jeunes entreprises à exploiter pleinement leur potentiel d’innovation et de création d’emplois. »
Un plan d’action spécial start-up
Partant de ce constat, la commission européenne vient de dévoiler un plan d’attaque destiné à stimuler la transformation en initiative commerciale, des idées géniales qui naissent quotidiennement dans les cerveaux européens.
L’initiative en faveur des start-up (jeunes entreprises) et des scale-up (entreprises en expansion) réunit une série de mesures existantes et de nouvelles actions destinées à créer un cadre plus cohérent pour permettre aux jeunes entreprises de se développer et d’exercer leurs activités dans toute l’Europe.
Il s’agit en particulier de permettre :
Un meilleur accès au financement
La Commission et le groupe de la Banque européenne d’investissement sont en train de créer un Fonds paneuropéen de fonds de capital-risque. L’UE fournira des investissements clés, d’un montant maximal de 400 millions €, et le ou les gestionnaires de fonds devront réunir au moins le triple auprès de sources privées, créant ainsi un potentiel d’au moins 1,6 milliard € de fonds de capital-risque. Le Fonds sera géré par un ou plusieurs gestionnaires de fonds professionnels et expérimentés pour garantir une approche adaptée aux réalités du marché. Il complète les instruments de financement existants de l’Union, tels que le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI), le programme européen pour les petites et moyennes entreprises (COSME) et le programme de financement de la recherche et de l’innovation de l’UE, «Horizon 2020».
Une deuxième chance pour les entrepreneurs
La Commission a présenté une proposition législative concernant la législation en matière d’insolvabilité, qui donnera aux entreprises qui connaissent des difficultés financières la possibilité de se restructurer à un stade précoce afin d’éviter la faillite et le licenciement du personnel. Elle permettra en outre aux entrepreneurs honnêtes de bénéficier plus aisément d’une seconde chance sans être pénalisés pour l’échec de précédents projets entrepreneuriaux, puisqu’ils seront pleinement libérés de leurs dettes après une période maximale de trois ans.
Une simplification des déclarations fiscales
La Commission travaille également sur une série de simplifications de nature fiscale, dont la récente proposition relative à une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS), qui propose de soutenir les entreprises innovantes et de petite taille qui souhaitent développer leurs activités par-delà les frontières. D’autres initiatives comprennent des projets de simplification du système de TVA de l’UE et l’élargissement des futures orientations sur les bonnes pratiques observées dans les régimes fiscaux nationaux applicables au capital-risque.
Coaching
L’initiative met également l’accent sur la manière d’aider les entreprises à s’orienter parmi les exigences réglementaires, d’améliorer le soutien à l’innovation en apportant des modifications au programme «Horizon 2020», et de favoriser la création d’écosystèmes où les jeunes entreprises peuvent être mises en contact avec des partenaires potentiels, tels que des investisseurs, des partenaires commerciaux, des universités et des centres de recherche.
Les modifications apportées au programme «Horizon 2020» ouvriront la voie à la création d’un Conseil européen de l’innovation et consisteront notamment à mobiliser 1,6 milliard € sur la période 2018-2020 pour fournir un appui suivant une approche ascendante aux projets d’innovation décisifs de jeunes entreprises qui présentent un potentiel d’expansion.
Le réseau Startup Europe sera renforcé en vue de relier les grappes d’entreprises et les écosystèmes dans toute l’Europe. En 2017, la Commission présentera des propositions sur un portail numérique unique afin d’offrir un accès en ligne simplifié aux informations concernant le marché unique, aux procédures, aux services d’assistance et de conseils pour les citoyens et les entreprises. Le réseau Enterprise Europe Network (EEN) fournit des services de conseil spécifiques aux jeunes entreprises, par l’entremise de conseillers spécialisés dans l’expansion des entreprises, notamment sur les possibilités de financement, les partenariats et les modalités d’accès aux marchés publics transfrontaliers.
La Commission adoptera également une série de mesures visant à soutenir l’utilisation des droits de propriété intellectuelle par les PME et favoriser l’accès des start-up aux marchés publics européens, dont la valeur s’élève à 2 000 milliards €.
Plus d’infos ?
En lisant la fiche « accès au financement pour les start-ups en Europe », jointe à la présente.