Les sites web pour enfants respectent-ils la vie privée ? Une enquête statistique tend à démontrer que non.
Publié le 06/11/2005 par Etienne Wery
Belle initiative : l’’Université d’Anvers a passé en revue 294 sites essentiellement destinés aux mineurs, pour analyser sur un plan statistique, la situation des données à caractère personnel. Alors que 8 sites sur 10 collectent des données personnelles, seuls 4 sites sur 10 présentent une déclaration relative au respect de la vie privée. En outre,…
Belle initiative : l’’Université d’Anvers a passé en revue 294 sites essentiellement destinés aux mineurs, pour analyser sur un plan statistique, la situation des données à caractère personnel. Alors que 8 sites sur 10 collectent des données personnelles, seuls 4 sites sur 10 présentent une déclaration relative au respect de la vie privée. En outre, cette information légalement obligatoire est souvent incomplète. C’est une des conclusions que tire le professeur dr. Michel Walrave de l’Université d’Anvers
Voici une présentation résumée de son étude publiée en néerlandais sur le site www.saferinternet.be et sur le site www.e-privacy.be.
Près de 8 sites sur 10 examinés (82,4%) collectent des informations personnelles d’une manière ou d’une autre. La demande est faite au visiteur de donner son nom (81%), des coordonnées telles que l’adresse e-mail (87%), l’adresse du domicile (54%), le numéro de téléphone (32%) ou de GSM (19%), mais également des caractéristiques personnelles comme l’âge (37%), le sexe (15%), les passe-temps (7%), la nationalité (6%) ou l’éducation scolaire (5%).
Pourtant, la Commission de la Vie privée stipule dans son avis (no. 38/2002) que ‘les données qui permettent l’identification directe du mineur d’âge, telles que son nom de famille, son adresse, le numéro de téléphone, sa photo ou le nom de l’école qu’il (ou elle) fréquente ne devraient, en principe, pas être collectées’.
De plus, la Commission considère comme illégale toute collecte de données pour des raisons de marketing axées sur des mineurs d’âge qui n’ont pas encore atteint l’âge de discernement. Au vu des sites s’adressant à ce public cible (jeunes de moins de 12 ans), on constate que les visiteurs ont la possibilité de citer non seulement leur adresse e-mail (80%), mais aussi leur nom (67%), leur adresse (44%), leur numéro de téléphone (22%), de GSM (10%) et même des informations concernant des tierces personnes (6%).
Parmi les sites qui collectent de telles données, 4 sur 10 (39%) seulement présentent une déclaration relative à la vie privée. Celle-ci est souvent incomplète, difficile à repérer sur le site ou noyée parmi d’autres informations juridiques ou de conditions d’utilisation. Presque 7 sites sur 10 mentionnent que le visiteur a un droit d’accès et de rectification, mais la procédure à suivre manque souvent de clarté. Dans plus de 50% des déclarations sur la vie privée, les visiteurs peuvent lire que leurs données seront utilisées pour du marketing direct, et 4 sites sur 10 n’offrent pas la possibilité de s’opposer à cette utilisation.
Des sites étudiés s’adressant surtout à des enfants et des adolescents, l’équipe de chercheurs a vérifié si les déclarations sur la protection de la vie privée reprennent des informations pour les parents et si les enfants sont conviés à demander conseil à ceux-ci avant de communiquer des données personnelles. Ce qui est recommandé par la Commission pour la Protection de la Vie privée. Dans seulement 12% des déclarations, on retrouve une information destinée aux parents.
Quant aux cookies, s’ils facilitent parfois le surf, ils peuvent être aussi utilisés pour dresser la carte du parcours suivi par les visiteurs de sites Internet. 54,5% des sites visités utilisent des cookies. Dans 76% des cas examinés, le visiteur ne reçoit aucune information sur ces cookies. Lorsqu’on rejette les cookies, l’accès direct sans problèmes au site Internet n’est possible que dans 30% des cas.
Le droit à l’information, le droit d’accès à ses données personnelles, le droit de rectifier celles-ci et le droit au refus sont essentiels dans le cadre de la protection de la vie privée, et ne valent d’ailleurs pas uniquement pour les jeunes.
Cette enquête montre que beaucoup de sites Internet ne respectent pas strictement la législation en matière de protection de la vie privée. Les sites s’adressant aux jeunes devraient y être pourtant plus attentifs encore, traduire les principes de la loi sur la vie privée de manière compréhensible pour ce groupe cible et même demander l’avis ou la permission des parents dans certains cas.
Plus d’infos ?
En lisant l’enquête (en néerlandais), sur les sites www.e-privacy.be et http://www.saferinternet.be
Le Prof. dr. Michel Walrave travaille au Département des Sciences de la Communication de l’Université d’Anvers. Il poursuit des recherches et donne cours concernant entre autres les implications de la société d’information, notamment la protection de la vie privée sur Internet et le télétravail.