Les contrats de positionnement sur l’internet
Publié le 28/07/2002 par Arnaud Dimeglio
Les contrats de positionnement ont pour objet l’achat d’un mot clé dans un outil de recherche et, en fonction de ce mot, le positionnement d’un site en tête de résultat. Le positionnement permet de drainer un trafic qualifié, ciblé, vers un site web et, en ce sens, présente un intérêt majeur en terme de visibilité.…
Les contrats de positionnement ont pour objet l’achat d’un mot clé dans un outil de recherche et, en fonction de ce mot, le positionnement d’un site en tête de résultat. Le positionnement permet de drainer un trafic qualifié, ciblé, vers un site web et, en ce sens, présente un intérêt majeur en terme de visibilité.
Par rapport au référencement, le positionnement constitue une forme de publicité, ce qui implique au moins trois conséquences sur le plan juridique : la première, que l’éditeur de l’outil, doit veiller à bien informer le public sur la nature publicitaire du résultat fourni. La seconde, que ceux qui achètent des mots clefs ne doivent pas effectuer de publicité interdite, trompeuse ou comparative.
La troisième a trait à la loi Sapin du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique, laquelle s’applique aux vendeurs d’espace publicitaire et aux intermédiaires dans l’achat d’un espace publicitaire. Ce qui nous amène à distinguer selon que le positionnement est effectué directement par un outil de recherche ou, indirectement, par l’intermédiaire d’un tiers.
Préliminairement, il est important de souligner que d’un point de vue juridique, contrairement au langage courant qui emploie le terme de « vente » de mot clef, les contrats de positionnement ne constituent pas des contrats de vente mais des contrats d’entreprise. En effet, ils n’ont pas pour objet le transfert d’un bien qui serait en l’espèce un mot clé ou un espace publicitaire, mais une prestation consistant dans la diffusion d’une annonce.
Il en résulte que les règles relatives au contrat de vente n’ont pas à s’appliquer. De même, il convient de préciser que le terme d’achat ou de vente utilisé par la loi Sapin doit être entendu dans le sens de service, et par conséquent, il n’y a pas d’obstacle à ce que cette loi s’applique au positionnement.
En sa qualité de contrat d’entreprise, le contrat de positionnement bénéficie d’une grande liberté. Et cette liberté se retrouve au travers des offres croissantes de positionnement. On peut citer à titre d’exemple, celles de Google, Voilà, et Yahoo.
La plupart de ces offres permettent d’acheter directement son positionnement en ligne en effectuant un paiement par carte bancaire. Le paiement par l’acheteur correspond à un forfait calculé, selon les offres, soit en fonction du clic (CPC) soit des milles pages vues (CPM). Le mot clé peut ensuite être vendu en l’état ou aux enchères.
Ces contrats prévoient le plus souvent l’interdiction faite à l’annonceur de diffuser une publicité illégale, avec une forte responsabilité à la charge de ce dernier, et en sens inverse, l’exonération de celle de l’outil. Le contrat de positionnement étant un contrat d’adhésion, il est généralement établi en faveur de l’outil de recherche et il convient de s’interroger où se situe la limite de telles clauses.
En effet, l’annonceur se présente comme un consommateur face à l’outil de recherche. Il devrait par conséquent bénéficier des règles relatives au Code de la consommation telles que les clauses abusives et les contrats à distance. En vertu des premières, si les clauses prévues dans le contrat créent un déséquilibre significatif au détriment de l’annonceur, elles seront réputées non écrites.
S’agissant des secondes, elles impliquent en faveur du consommateur, une information renforcée, un droit de rétractation, et le bénéfice des règles européennes relatives à la loi applicable et la juridiction compétente.
Enfin, en application de la loi Sapin, le vendeur devra rendre compte à l’annonceur, dans le mois qui suit, des conditions dans lesquelles sa prestation a été effectuée. En cas de modification prévue dans la diffusion du message publicitaire, il devra en outre obtenir préalablement l’accord de l’annonceur.
Le contrat de positionnement direct n’est donc pas complètement libre. Souvent rédigé en faveur des outils, le droit de la consommation et la loi Sapin, devraient permettre de les rééquilibrer en faveur des annonceurs.
Le positionnement est indirect lorsqu’il passe par un tiers. Ce dernier peut se présenter soit comme un outil de recherche, soit comme un prestataire, dénué de support.
Le premier cas peut être illustré par les outils de recherche tels que Espotting et Overture. Ceux-ci ont pour particularité d’offrir le positionnement non seulement dans leur propre base de donnée mais aussi dans celles de partenaires. Il en résulte qu’un contrat est conclu entre ces outils. L’outil initial apparaissant comme un intermédiaire, la question se pose de l’application de la loi Sapin.
Pour que celle-ci s’applique, il faudrait que l’outil partenaire dispose d’une offre commerciale permettant aux annonceurs d’acheter directement un espace publicitaire. Or, généralement, tel n’est pas le cas : le partenaire ne dispose pas d’un barème des prix propre à son espace.
En réalité, ces contrats ont pour objet la diffusion des résultats de l’outil initial, et en échange de cette diffusion, l’outil partenaire perçoit une rémunération. Le partenaire apparaît ainsi comme un prestataire au service de l’outil initial, et ce dernier, comme un vendeur d’espace. Ceux ci devraient donc être soumis à la loi Sapin non pas en leur qualité d’intermédiaire mais comme vendeur d’espace.
En revanche, les prestataires de positionnement, peuvent être qualifiées d’intermédiaires dans l’achat d’un espace publicitaire. Leurs prestations consistent en effet à commercialiser des offres directes ou indirectes de positionnement.
Il en résulte que, en application de la loi Sapin, le contrat de positionnement conclu entre le prestataire et l’annonceur devra être rédigé par écrit, faire l’objet d’un mandat, et contenir certaines mentions obligatoires comme les conditions de rémunération du prestataire, et le détail de ses prestations.
Ensuite, tout rabais ou avantage tarifaire de quelque nature que ce soit accordé par le vendeur devra figurer sur la facture délivrée à l’annonceur et ne pourra être conservé par l’intermédiaire, qu’en vertu d’une stipulation expresse du contrat de mandat. De plus, même si les achats de positionnement ne sont pas payés directement par l’annonceur au vendeur, la facture devra être communiquée directement par ce dernier à l’annonceur.
Au niveau de la rémunération, le prestataire devra être rémunéré par l’annonceur et non par le vendeur.
Enfin, si l’intermédiaire fournit des services de conseil en plan média ou de préconisation de support et qu’il entretient avec le vendeur des liens financiers, il doit indiquer dans ses conditions générales de vente le montant de ses participations. Ces obligations sont sévèrement sanctionnées par des peines d’amende atteignant 2 000 000 de F.
A côté de ces obligations, subsiste, en cas de modification devant intervenir dans la diffusion d’une annonce, celles d’information et de consentement de l’annonceur ; du vendeur à l’égard de l’intermédiaire, et de ce dernier à l’égard de l’annonceur. Mais contrairement aux précédentes, ces obligations n’apparaissent pas pénalement sanctionnées.
En conclusion, selon qu’ils sont effectués de façon directe ou indirecte, il existe toute une gradation dans la réglementation des contrats de positionnement. Lorsque le positionnement passe par un intermédiaire, en raison des lourdes peines qu’elle prévoit, les outils de recherche, et les prestataires de positionnement devront particulièrement être vigilants à l’égard de loi Sapin.