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Le recours électronique en Suisse

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La Suisse parait hésitante : d’une part le législateur qui hésite à assumer pleinement le recours à l’électronique dans les procédures, et d’autre part la jurisprudence qui met sur les avocats un lourd fardeau. Suite à un arrêt du Tribunal fédéral, l’avocat supporte l’entière responsabilité de l’envoi de ses procédures adressées par la voie électronique, même si le service utilisé est en panne.

Introduction 

La Suisse n’est pas en avance en matière de nouvelles technologies de l’information et de la communication (ci-après : NTIC). N’étant pas soumis au droit européen, l’ordre juridique suisse comporte des règles générales traditionnelles qui ne sont aujourd’hui plus adaptées à l’avancée de l’informatique, contrairement à ses voisins européens.

La Suisse ne s’est encore dotée d’aucune loi spécifique sur la responsabilité des prestataires de techniques. Non soumis à l’application du droit européen et de ses directives, le droit suisse est souvent emprunt de notions similaires voire identiques à celui-ci. En matière de NTIC, et à l’exception de quelques textes isolés, rien n’a été fait et les tribunaux, souvent dépassés par cette avancée technologique, doivent affronter ces problèmes avec crainte et timidité n’ayant aucun arsenal légal à disposition. Dans ces circonstances de flou juridique, avocats et juges sont souvent bien démunis lorsqu’il faut plaider ou juger. 

L’envoi électronique en Suisse

Le 1er janvier 2011, la Suisse a initié une révolution législative majeure en unifiant les 26 codes de procédures cantonaux civiles et pénaux. Depuis le 1er janvier 2011, il n’existe qu’un seul code de procédure civile et un seul code de procédure pénale pour l’ensemble de la Suisse. En matière de procédure civile et pénale, il est possible d’adresser, dans toute la Suisse, des actes aux autorités par la voie électronique en passant par le biais d’organisme de certification de signature électronique (IncaMail et PrivaSphere), institutions mises en place en collaboration avec la Fédération Suisse des Avocats (FSA). Ces deux prestataires sont reconnus par la Confédération et la FSA et certifient le cryptage et la transmission de données adressées électroniquement aux autorités.

Depuis 2003 déjà, une loi sur les services de certification dans le domaine de la signature électronique a été édictée (SCSE). Elle a été complétée le 1er janvier 2011 par une ordonnance du Conseil fédéral pour la « communication électronique dans le cadre de procédures civiles et pénales et de procédures en matière de poursuite pour dettes et de faillite ». Cette ordonnance précise les règles du code de procédure civile (CPC), du code de procédure pénale (CPP) et de la loi sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP) en matière d’envoi électronique.

L’avocat suisse désireux d’envoyer ses procédures judiciaires par email, doit encore obtenir une signature électronique certifiée et s’enregistrer auprès de SwissID, lequel transmet une carte d’identité électronique à l’avocat (voir : http://www.suisseid.ch/endkunden/suisseid/index.html?lang=fr).

Jurisprudence récente 

Dans une affaire pénale genevoise, X a voulu interjeter appel contre la décision le condamnant à une peine pécuniaire. Comme d’habitude, c’est le dernier jour du délai que l’acte d’appel devait être envoyé. Seulement voilà, IncaMail, le service d’envoi électronique sécurisé de la Poste suisse, était inaccessible. Cette panne aurait été liée à un défaut frappant la version Mac du logiciel client fourni par la Poste au moment des faits. L’affaire est montée jusqu’au Tribunal fédéral, lequel a débouté le recourant de ses conclusions dans un arrêt rendu le 21 février 2013.

Le Tribunal fédéral suisse a considéré qu’il existait un risque inhérent à l’envoi électronique puisque des pannes de service peuvent survenir à n’importe quel moment. Dès lors, en cas de doute, il incombe à l’avocat d’adresser une copie papier de son acte, sous peine d’irrecevabilité pour notification tardive. 

Les lois de procédure civile et pénale prévoient en effet que : « lorsqu’un acte est transmis par voie électronique, le délai est respecté si le système  informatique correspondant à l’adresse électronique officielle du tribunal confirme sa réception le dernier jour du délai au plus tard » (art. 142 al. 2 CPC et 91 al. 3 CPP). Une confirmation électronique est dès lors obligatoire pour être certain d’avoir respecté le délai.

En l’espèce, faute d’accès au système le jour du délai, l’envoi n’a pu être confirmé électroniquement. Ce n’est que le lendemain du jour j, et après deux autres tentatives que l’acte a finalement pu être notifié au Tribunal. Mais avec un jour de retard  !

Dans ces circonstances, le Tribunal fédéral a considéré que l’appel était tardif et que les conditions d’une demande de restitution du délai n’étaient pas réunies. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral refuse de se prononcer sur la notion de responsabilité du service d’envoi IncaMail en sa qualité de prestataires de services électroniques. Même si la prudence aurait commandé d’adresser spontanément une copie papier de l’acte au Tribunal, la responsabilité de l’avocat n’en reste pas moins pleine et entière, puisqu’aucune restitution de délai ne sera dorénavant tolérée.

On aurait évidemment souhaité que cette jurisprudence nous éclaire un peu plus sur le mécanisme de responsabilité de services officiels comme IncaMail ou PrivaSphere pour les cas de pannes de service ou de défauts logiciels affectant la possibilité de recevoir un accusé de réception. A défaut de responsabilité du prestataire, le Tribunal fédéral aurait également pu se prononcer sur les mécanismes techniques qui devraient être mis en place par ces deux seuls organismes disponibles.

Conclusion

Cette sévérité de la plus Haute Cour suisse n’est pas de bon augure pour l’avancée législative et psychologique des NTIC et risque de décourager plus d’un avocat suisse de franchir le cap de la plume pour passer au binaire. L’avocat suisse 100% électronique n’est pas encore né !

 

La décision du Tribunal fédéral peut être consultée ici.

 

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