Le projet de loi transposant la 2ème directive monnaie électronique, enfin déposé au Sénat !
Publié le 02/09/2012 par Cathie-Rosalie Joly, Lise Breteau
Après plusieurs tentatives de transpositions par voie d’habilitations législative, c’est finalement le projet de loi déposé au Sénat le 1er août 2012 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, qui devrait [ enfin !] transposer en France la deuxième directive monnaie électronique 2009/110/CE du 16 septembre 2009 (dite DME2)
Après trois tentatives infructueuses de transposition de la DME2 par voie d’ordonnance conformément à la procédure prévue à l’article 38 de la Constitution, qui permet au parlement d’autoriser le gouvernement à transposer par ordonnance pendant un délai limité, des mesures qui relèveraient normalement de la loi (cette procédure, avait d’ailleurs été utilisée pour la transposition de la directive sur les services de paiement), c’est finalement par projet de loi que le nouveau gouvernement entend transposer la DME2.
Il était temps, car la transposition aurait normalement dû avoir lieu avant le 1er Mai 2011.
Une procédure d’infraction a d’ailleurs été ouverte par la Commission européenne le 25 avril dernier à l’encontre de la France, la Belgique, l’Espagne, Chypre, la Pologne et le Portugal. Il est donc urgent pour la France de transposer la DME2 sous peine de se voir infliger des sanctions financières.
Après la Belgique qui a approuvé en Conseil des ministres le 11 mai dernier, deux avant-projets de loi qui ont vocation à transposer en droit belge la DME2, c’est donc au tour de la France de déposer son projet de loi de transposition.
Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière doit transposer trois directives européennes : la directive 2009/ 110/CE du 19 septembre 2009 sur la monnaie électronique (dite DME2), la directive 2010/78/CE du 24 novembre 2010, dite « Omnibus I », sur les compétences des autorités européennes de supervision des banques, des assurances et des marchés financiers, et la directive 2011/7/UE du 16 février 2011 sur la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales.
Le Titre I du projet de loi transpose la DME2.
Les articles du Titre I ont vocation à réformer le statut d’établissement de monnaie électronique (tel qu’issu de la directive 2000/46/CE du 18 septembre 2000, dite DME1, qui est toujours en vigueur en France) pour le mettre en conformité avec les règles de la DME2 qui aligne le statut des établissements de monnaie électronique (EME) sur celui des établissements de paiement (EP) et rénove la réglementation applicable à l’émission et la gestion de monnaie électronique.
La DME2 étant d’harmonisation maximale, la réglementation française va donc reprendre en droit national les dispositions instaurées au niveau européen en transposant les nouvelles règles prévues pour l’émission de monnaie électronique, telles que :
- abaissement des exigences de capital minimum qui seront ramenées de 1.000.000 euros aujourd’hui à 350.000 euros,
- possibilité de statut hybride ce qui permet à un établissement d’être autorisé à proposer des services commerciaux en plus de ses activités réglementées,
- possibilité de proposer des services de monnaie électronique ainsi que des services de paiement,
- évolution des conditions de remboursement de la monnaie électronique et des frais applicables,
- encadrement des réseaux de distribution physiques,
- etc.
Bien que la DME2 soit d’harmonisation totale, les Etats membres gardent tout de même une marge de manoeuvre sur la mise en oeuvre de certaines dispositions ou options.
Ainsi, notamment :
- en matière de lutte anti-blanchiment et de réseaux de distribution il est envisagé en France de demander aux EP et EME agréés dans un autre Etat membre (mais qui distribuent leurs services en France via un réseau de distribution physique), de désigner un représentant permanent résidant en France,
- le projet de loi prévoit également des dispositions pour les transferts de fonds effectués en monnaie électronique,
- le projet de loi précise les règles applicables aux titres spéciaux de paiement dématérialisés,
- une bonne nouvelle pour les sociétés qui se lancent, alors que la France n’avait pas transposé de statut d’établissement de paiement exempté, le projet de loi instaure un statut d’EME exempté « taille réduite » pour les établissements dont les activités commerciales dans leur ensemble génèrent une moyenne de la monnaie électronique en circulation inférieure à 5 millions d’euros (précisons que les statuts exemptés ne peuvent pas bénéficier du passeport européen et sont soumis à des règles particulières)
- etc.
D’autres statuts alternatifs au statut d’Etablissement de monnaie électronique (de régime plein), peuvent être intéressants pour les sociétés qui souhaitent se lancer dans une activité de distribution de monnaie électronique, à côté du statut d’Etablissement de monnaie électronique « taille réduite » cité précédemment, il y a également les statuts d’intermédiaires en opération de banque et services de paiement (IOBSP), d’agents en services de paiement ou de distributeurs de monnaie électronique.
Le projet de loi déposé au Sénat devrait être envoyé prochainement à la commission des finances, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale. Si aucun calendrier précis n’est prévu à ce jour, une chose est certaine, il conviendra de suivre avec attention les débats, qui devraient débuter au Sénat à la rentrée.
Liens utiles:
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– Compte-rendu du Conseil des ministres du mercredi 1er août 2012 – Directive monnaie électronique 2009/110/CE du 16 septembre 2009 (« DME2 » ou « EMD2 », publiée au JOCE L. 267/7 du 10 octobre 2009)
– Actualité Droit & Technologies du 15 mai 2012 https://www.droit-technologie.org/actuality-1478/deuxieme-directive-monnaie-electronique-la-belgique-et-la-france-m.html