Le Président Hollande et le Roi des belges vantent les vertus de l’infidélité !
Publié le 21/10/2012 par Etienne Wery
Non, vous ne rêvez pas : c’est bien le Président français, le Roi des belges ou encore les anciens Présidents Clinton, Mitterand ou Sarkozy qui font la retape pour un site spécialisé dans les aventures extraconjugales. Bien entendu, leur image est utilisée à leur insu. Légalement ?
Ashley Madison.com est un site libertin. Son slogan : « La vie est courte, tentez l’aventure ». Jusque là, il suffit de ne pas visiter le site si on désapprouve. Il sera par contre plus difficile d’échapper à la campagne de publicité qui sévit actuellement eu Europe.
Venant en droite ligne des USA et reprenant une thématique abondamment utilisée outre-Atlantique, le site joue la provocation en mettant en scène des chefs d’état et autres personnalités ayant eu (ou ayant prétendument eu) une relation extraconjugale. Qu’auraient donc en commun ces personnes, selon le site : leur envie de profiter de la vie.
L’utilisation de l’image de chefs d’état est-elle autorisée dans ce contexte clairement commercial ?
Il y a deux niveaux de réflexion : la vie privée d’une part, et le droit à l’image d’autre part.
La vie privée
Tout personne, parfait anonyme ou star hollywoodienne, se voit reconnaître un droit au respect de sa vie privée. Un homme politique dispose de ce droit au même titre que les autres.
La seule difficulté consiste à faire la part des choses entre vie privée d’une part, et vie publique d’autre part. Appliquer cela en pratique est parfois malaisé car les (d)ébats politiques auxquels se trouvent constamment mêlés les hommes politiques, intègrent nécessairement certaines questions liées à leur vie privée, à leurs convictions les plus profondes et à leur manière de les vivre (A. BERTRAND, Droit à la vie privée et à l’image, Paris, Litec, 1999, p. 28). On en a encore abondamment parlé avec les frasques du président Berlusconi qui intégrait ses soirées libertines dans son mode de gouvernance.
M. Sarkozy, alors qu’il était président, s’est opposé au journal suisse « Le Matin » qui, au cours du mois de Mai 2005, avait publié une série d’articles et de photographies ayant trait à l’intimité de la vie conjugale de Nicolas Sarkozy et de son épouse, peu avant leur divorce.
Que la presse s’intéresse au divorce présidentiel est une chose admise : cela peut avoir une répercussion sur l’aptitude à gouverner du Président, et donc faire l’objet d’un débat public.
Que la presse s’immisce à ce titre de façon excessive dans sa vie privée est une autre chose, condamnée.
Dans l’affaire Le Matin, le juge a fait la part des choses :
- Pour certaines informations, il a conclut que « les intéressés ont eux-mêmes contribué, à travers des entretiens avec des journalistes de la télévision ou de la presse écrite, à porter à la connaissance du public des informations sur leur entente professionnelle renforcée par l’affection qu’ils se portaient mutuellement, de sorte qu’au-delà de leur notoriété personnelle, c’est bien le couple qu’ils formaient qui a revêtu un caractère public (…) ». (…) « Ce faisant, le demandeur a, lui-même repoussé les limites de la protection légale de l’article 9 du Code civil ». (…) « Le Matin a porté à la connaissance de ses lecteurs un fait déjà révélé constituant un événement d’actualité ».
- Pour d’autres informations, il a au contraire sanctionné car excessives et inutiles « à l’appui d’un débat d’intérêt général ».
Le droit à l’image
Le droit à l’image est proche mais pas identique.
En résumé, le droit à l’image permet à toute personne de s’opposer – quelle que soit la nature du support utilisé – à la reproduction et à la diffusion, sans son autorisation expresse, de son image.
Il y a des exceptions, par exemple liées au droit à l’information.
Le droit à l’image est aussi lié aux données personnelles parce que l’image d’une personne est une donnée à caractère personnel.
Lorsque l’utilisation de l’image est commerciale, sans rapport avec l’actualité et effectuée sans le consentement de la personne concernée, elle est presque toujours illicite.
oOo
Ashley Madison.com a-t-il oublié ces principes, ou est-il mal conseillé ?
Bien sur que non. Trois choses expliquent généralement ce genre de publicité :
- Le fait que toutes les personnes concernées n’agiront pas, d’où une diminution du risque.
- Le fait que les dommages et intérêts sont souvent inférieur au bénéfice commercial escompté.
- Le fait que plus la publicité est provocante, plus on en parlera, créant un buzz qui est lui aussi une publicité gratuite.