Le parti des pirates sera représenté au Parlement européen !
Publié le 09/06/2009 par Etienne Wery
Le parti des pirates enverra un représentant au Parlement européen. Tel est le verdict des élections européennes en Suède, où un adulte sur quatre âgé de moins de trente a voté pour ce parti. Est-ce une réaction épidermique au jugement PirateBay ?
Le parti des pirates est un parti politique suédois fondé en 2006.
Son programme est assez simple, et très orienté NTIC : il souhaite diminuer les droits de la propriété intellectuelle, comme le copyright, les brevets et la protection des œuvres. Il veut aussi renforcer les libertés individuelles, à commencer par la protection de vie privée sur l’internet.
Il n’est donc ni vraiment de gauche, ni vraiment de droite, mais orienté résultat sur quelques points bien précis.
Ce qui n’était qu’un épiphénomène a pris des proportions significatives en 2009, quand les élections suédoises en ont fait le troisième plus gros parti suédois en nombre de membres. Et cela risque de durer car la branche étudiante de ce parti est ni plus ni moins la plus grosse organisation politique des jeunesses suédoises.
Dans le cadre des élections européennes, Christian Engström (49 ans) a obtenu un siège à Strasbourg en récoltant 7.1% des voix.
Est-ce une réaction à l’affaire PirateBay, qui a vu les fondateurs du site peer to peer condamnés sévèrement (un an de prison et 3 millions d’euros d’amende). Cela a certes contribué, mais il serait sans doute réducteur de n’y voir que cela.
En Suède, un adulte sur quatre âgé de moins de trente a voté pour ce parti. Tous ne sont pas des ados frénétiques de l’informatique, des Geeks, vissés à leur clavier tout occupés à échanger les derniers tubes sur les réseaux peer to peer.
Et puis, il y le phénomène de propagation sur l’internet, où des sites et blogs de soutien apparaissent un peu partout, et où l’on voit des tentatives assez claires de récupération qui proviennent essentiellement des milieux altermondialistes, tiers-mondistes, ou d’extrême gauche.
On peut ainsi lire au gré des blogs la Déclaration de Principes du Parti Pirate Suédois, présenté comme le « texte fondateur dans lequel chaque Parti Pirate se reconnait et se réfère » :
Les trois principes fondamentaux de notre action sont la protection des droits des citoyens, la libération de la culture et la conscience que les brevets et les monopoles sont nuisibles au fonctionnement de notre société.
Notre société est devenue celle du contrôle et de la surveillance, où chaque citoyen est fiché et espionné. Il n’est pas dans l’intérêt d’un système judiciaire moderne de considérer, a priori, le citoyen comme un suspect qu’il faudrait surveiller en permanence. Toute démocratie implique le respect des droits fondamentaux des citoyens.
Les Droits d’Auteur (Copyright) ont été créés à l’origine, pour encourager la création, le développement et la distribution des oeuvres culturelles, et nécessitent un juste équilibre entre la mise à disposition et la diffusion et le respect des droits des créateurs et leur juste rémunération. Nous affirmons que le système actuel des Droits d’Auteur n’est plus équilibré. Accéder librement à la culture profiterait pourtant à l’ensemble de la société. Cependant, les restrictions importantes et systématiques engendrées par les lois sur les Droits d’Auteur nuisent à de tels objectifs, en limitant à la fois la création et l’accès à la culture.
Les monopoles privés sont un des pires maux de notre société moderne car ils conduisent immanquablement à une hausse du coût des oeuvres culturelles et à d’importants coûts dissimulés aux citoyens. Par ailleurs, les brevets ne sont à l’arrivée qu’une mainmise sur les idées. C’est ainsi que de grandes entreprises ne cessent de déposer des brevets, afin d’empêcher les concurrents de moindre importance de pouvoir se développer de manière équitable. En effet, le but de ces grandes entreprises est, non pas d’adopter une politique de prix en fonction de la demande, mais d’utiliser ces brevets comme un levier, afin d’augmenter les prix à la vente et d’imposer des mesures sévères concernant l’utilisation des licences. C’est pour cette raison que nous voulons limiter l’influence de tels monopoles, que nous considérons comme dangereux et superflus.
Le système de Marque Déposée (Trademark) est un système qui fonctionne bien, en tant que moyen de défense des intérêts des consommateurs, et nous ne nous opposons pas à un tel système.
En réalité, il semble que pour comprendre le phénomène, il faut veiller à scinder les deux aspects : la propriété intellectuelle d’une part, et la protection des libertés individuelles d’autre part.
Si le premier sujet est sans conteste celui qui fait le plus de bruit, il est probable que le second sujet soit celui qui inquiète et intéresse au premier chef les électeurs âgés de 25, 30, 35 ans ou plus.
La distinction est intéressante aussi dans la perspective du Parlement européen qui, s’il ne semble pas prêt à court terme à révolutionner la propriété intellectuelle ou à la diminuer de quelque manière que ce soit (à l’exception de son refus de la brevetabilité des logiciels et de sa position sur la loi HADOPI, mais dans les deux cas les enjeux étaient bien spécifiques), a toujours montré un vrai intérêt pour les libertés individuelles et la vie privée en particulier.
Et pendant ce temps la, en Chine …
On apprend que la Chine va équiper chaque PC vendu en Chine d’un logiciel de filtrage intégré permettant de bloquer à partir du PC la visite de certains sites qui déplaisent aux autorités.