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Le marché unique des paiements sort de l’ornière : le Conseil européen adopte la directive sur les services de paiement

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On n’osait plus y croire mais cette fois, c’est fait ! Les ministres des finances réunis au sein du Conseil des affaires économiques et financières (ECOFIN) ont atteint ce 27 mars à l’unanimité, un consensus sur la proposition de directive sur les services de paiement (PSD). Avec plus d’un an de retard, ce texte crucial…

On n’osait plus y croire mais cette fois, c’est fait ! Les ministres des finances réunis au sein du Conseil des affaires économiques et financières (ECOFIN) ont atteint ce 27 mars à l’unanimité, un consensus sur la proposition de directive sur les services de paiement (PSD). Avec plus d’un an de retard, ce texte crucial pour le marché unique des paiements franchit donc la barre du Conseil. Le texte doit maintenant être examiné par le Parlement européen en deuxième lecture (ce qui devrait être une formalité vu l’unanimité au Conseil). On annonce un vote à Strasbourg pour cet été. Quoi qu’il en soit, la transposition n’interviendra pas avant le deuxième semestre 2009 … c’est tard pour un nouveau cadre que l’on voulait voir entrer en vigueur début 2008.

Trêve de lamentations quant au retard accumulé ! Il faut d’abord se réjouir de l’adoption d’un texte attendu comme le Messie, et féliciter le ministre des finances allemand (l’Allemagne assure la présidence tournante) qui avait fait de ce texte un des enjeux majeurs de la présidence (comme on le comprend !). Il a passé son examen avec la plus haute distinction puisque.

Charlie McCreevy, commissaire responsable du Marché intérieur et des services, ne cache pas non plus sa joie et annonce que :

Ceci est un pas décisif vers la création de l’espace unique de paiement en euros. C’est un bon compromis, qui favorise à la fois l’ouverture du marché et la protection des consommateurs. Des paiements transfrontaliers aisés et rapides entraîneront une réduction considérable des coûts pour l’économie de l’UE et des avantages réels et concrets pour les consommateurs. Les premiers éléments du SEPA devraient être mis en place dans moins de 10 mois. Tous ceux qui souhaitent un espace unique de paiement en euros et qui ont déjà investi massivement dans ce sens, et ils sont nombreux, se féliciteront de cet accord unanime. J’attends avec impatience les délibérations du Parlement européen et j’espère que cette directive essentielle pourra être adoptée le plus rapidement possible.

SEPA : qu’est ce que c’est ?

Il y a cinquante ans, quelques dirigeants visionnaires signaient les Traités fondateurs européens. Alors que la libre circulation des personnes et des services constituent des libertés fondamentales bien connues et effectives (même s’il est vrai que des améliorations sont toujours possibles et souhaitables), la libre circulation des capitaux est une affaire autrement plus délicate. La création en 1992 du Marché Unique, qui a bien réussi aux deux premières libertés, n’a pas été d’un même secours pour la dernière. Il est vrai que les Etats, soucieux de préserver leur système monétaire et leurs prérogatives de surveillance du système bancaire et financier, ont montré sur ce sujet un entrain qui déprimerait l’observateur le plus optimiste …

Puis, Bruxelles créa l’euro. Cette idée géniale (à nos yeux en tout cas) fut un véritable détonateur, tant au niveau des fondamentaux et de la gouvernance économiques, que pour la population.

Malheureusement, l’euro n’a pas tout solutionné. S’il a souffert (et continue de souffrir) des propos démagogiques de certains chefs d’Etat plus prompts à l’accuser de tous les maux qu’à nettoyer leurs écuries d’Augias, il s’est aussi révélé insuffisant, à lui seul, pour créer un véritable espace unique du paiement. C’est que les pratiques et réflexes nationaux sont très différents d’un Etat à l’autre. Que l’on songe à la difficulté, pour un touriste Belge, de réserver une chambre d’hôtes en France : le tenancier Français souhaite recevoir 100 € d’acompte et demande un chèque, alors que cet instrument de paiement a disparu du paysage belge depuis plusieurs années. Il ne reste alors qu’un mandat postal, ou un virement international qui échoue une fois sur deux parce que toutes les informations nécessaires ne sont pas en possession du payeur, lequel doit passer plusieurs coups de téléphone pour les récolter. Que l’on songe aussi aux frais prohibitifs facturés au Français qui retire de l’argent à un DAB espagnol pour le seul motif qu’il est à cet instant en dehors de son pays d’émission, jusqu’à ce que Bruxelles intervienne pour interdire cette pratique depuis juillet 2003.

De ce constat d’échec est née l’idée d’un véritable espace unique des paiements en euros, appelé SEPA (Single Euro Payment Area).

Comme l’explique la FBE (Fédération Bancaire Européenne) :

SEPA est un espace économique où les citoyens, les entreprises et les autres acteurs économiques pourront effectuer et recevoir des paiements en euro, dans l’Union Européenne élargie, que ce soit à l’intérieur de frontières nationales ou transfrontières, sous les mêmes conditions de base, avec les mêmes droits et obligations, quelque soit leur lieu de résidence. La monnaie unique en est le ferment, la fondation. L’objectif principal pour le citoyen est de rendre les paiements scripturaux intra européens, surtout électroniques, aussi faciles que les paiements fiduciaires.

Qui est responsable du SEPA ?

SEPA est un merveilleux exemple de la corégulation dont la société de l’information a le secret. Pour reprendre un terme cher aux anglo-saxons, la corégulation est l’interaction entre la hardlaw et la softlaw.

Il était en effet inimaginable qu’un projet aussi vaste (on le compare en difficulté à l’introduction de l’euro fiduciaire), soit mené sans la collaboration la plus totale de l’industrie. Celle-ci a répondu à l’appel, créant dès 2002 l’EPC (European Payments Council), qui se définit lui-même comme un centre de décision et de coordination pour l’industrie bancaire européenne dès l’instant où celle-ci est confrontée aux paiements.

Il revenait toutefois aux autorités publiques, à l’eurosystème et à la Commission européenne en particulier, de clarifier les objectifs finaux du SEPA, ce que ces institutions ont fait dès 2002 dans la foulée de l’agenda de Lisbonne grâce à diverses communications et plans d’action.

Eurozone et SEPA : quel lien ?

Cela coule de source : le SEPA constitue un objectif à la fois politique et économique lié à l’introduction de l’euro. Sans l’euro, le SEPA serait une vue de l’esprit, comme en témoigne le succès pour le moins mitigé des tentatives précédentes qui ont vainement essayé de rapprocher les systèmes de paiement dans l’espace européen. C’est dire si le projet se concentre d’abord et avant tout sur la zone euro, l’objectif étant d’effacer purement et simplement les barrières nationales lors des paiements électroniques, comme cela a pu être réalisé pour les paiements en liquide grâce à l’euro fiduciaire. En outre, si le projet s’intéressait de trop près, ou trop vite, aux pays situés en dehors de la zone euro, il serait inévitablement confronté à des pratiques encore plus différentes, ce qui retarderait d’autant le calendrier et risquerait de mener le projet à sa perte. Cela étant, SEPA poursuit également un objectif d’amélioration du marché unique créé en 1992. Le projet n’est donc pas restreint à l’euro-zone.

Les chantiers pris en charge par l’industrie

Les travaux menés par l’EPC depuis 2002 ont abouti à la création de trois familles d’instruments, constituant autant de projets que nous analyserons en détail ultérieurement :

  • SCT ou Sepa Credit Transfert. Ce nouveau cadre remplacera les virements nationaux et inter-européens par un virement standard.

  • SDD ou Sepa Direct Debit. Le projet remplacera à terme la domiciliation à l’échelle européenne. Le but est de créer un instrument paneuropéen permettant de débiter le compte d’une personne détenu auprès d’une banque de la zone SEPA, sur requête du créancier situé lui aussi dans la zone SEPA. Le prélèvement SDD permettra de traiter de la même façon des opérations de débit récurrentes ou ponctuelles, et ce sans limite de montant.

  • SCF ou Sepa Card Framework. Le but est de définir un cadre uniformisant les paiements par cartes.

Les chantiers pris en charge par le régulateur

Le texte le plus emblématique est sans aucun doute la proposition de directive concernant les services de paiements dans le marché intérieur, publiée en décembre 2005. C’est ce texte qui a fait l’objet d’un consensus ce 27 mars.

Ce texte contient trois piliers :

  1. Le premier pilier vise la liberté de fournir des services de paiements. L’objectif est l’harmonisation des conditions d’accès au marché, applicables aux prestataires de services de paiements autres que des établissements de crédits, dans le but de créer des conditions de concurrence égales, de stimuler la concurrence sur les marchés nationaux, et de favoriser l’entrée sur le marché d’une nouvelle génération de prestataires.

  2. Le deuxième volet porte sur l’harmonisation des exigences de transparence et d’informations. La Commission estime que la concurrence, le choix offert aux consommateurs et leur protection seront renforcés par des règles claires et cohérentes en matière de transparence des services de paiements. La directive introduira donc, pour les services de paiements, des exigences d’informations claires et succinctes qui se substitueront aux 25 jeux de règles nationales existants.

  3. Enfin, le troisième pilier définit les droits et obligations des utilisateurs et des prestataires de services de paiements. La clarté et la sécurité juridique concernant les principaux droits et obligations des utilisateurs et des prestataires de services de paiements sont essentielles, aux yeux de la Commission, pour développer des systèmes de paiements électroniques modernes et efficients, pour renforcer la confiance des utilisateurs et pour accroitre l’efficacité des entreprises sur le marché.
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