Le législateur belge adopte la loi portant modification de la législation relative aux jeux de hasard
Publié le 29/12/2009 par Thibault Verbiest, Momtchil Monov
La Chambre des Représentants a adopté, le 3 décembre 2009, la Loi portant modification de la législation relative aux jeux de hasard (ci-après, la « Loi »). Ele l’a fait sans aucune discussion en commission parlementaire et sans amendements supplémentaires, ce qui est pour le moins inattendu. La Loi précitée, soutenue par le Secrétaire d’Etat Carl Devlies (CD & V), vise à créer un cadre juridique commun pour tous les jeux de hasard, en ce compris ceux offerts sur Internet. C’est le terme d’un long processus législatif. La Chambre des Représentants (Chambre basse du Parlement belge) avait approuvé, le 16 juillet 2009, en première lecture la projet de loi. La Loi a été approuvée et amendée (par des amendements de nature légistique), le 19 novembre 2009, par le Sénat (Chambre haute du Parlement belge). Ensuite, le Sénat a renvoyé la Loi à la Chambre des Représentants en vue de la discussion de celle-ci par cette dernière Assemblée.
Entrée en vigueur de la Loi
La Loi n’a pas encore été publiée au Moniteur Belge (en date du 17 décembre 2009) et n’est donc pas encore entrée en vigueur. En vertu de l’article 61 de la Loi, celle-ci devrait, en principe, entrer en vigueur le 1er janvier 2011 au plus tard. Un Arrêté Royal peut déroger à la date précitée d’entrée en vigueur de la Loi et fixer une date d’entrée en vigueur antérieure à la date visée par l’article 61 de la Loi : un tel Arrêté Royal pourrait être pris au cours du premier trimestre 2010 (compte tenu du fait que la Commission belge des jeux de hasard mène des consultations en vue de la rédaction des futurs Arrêtés Royaux d’exécution de la Loi).
Débats parlementaires au Sénat et compatibilité de la Loi avec le droit communautaire
Dans le cadre des débats parlementaires qui ont eu lieu au Sénat, il convient de retenir le rejet, par une courte majorité, des amendements déposés par Madame la Sénatrice Marie-Hélène Crombé-Berton visant à supprimer le lien établi entre la nécessité de disposer d’un agrément offline pour pouvoir obtenir un agrément online : un tel lien suppose nécessairement l’établissement préalable d’un opérateur de jeux de hasard sur le territoire belge. A cet égard, plusieurs Sénateurs ont souligné que le lien établi par la Loi entre agréments offline/online soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le droit communautaire (sous l’angle des principes de libre prestation des services et de non-discrimination). Pour rappel, la Commission Européenne, dans son avis circonstancié sur la Loi, avait également fortement critiqué ce point de la Loi sous l’angle de son incompatibilité avec le droit communautaire. Force est de constater que le législateur belge n’en a pas tenu compte…
En conséquence, on ne saurait exclure un contentieux à l’initiative d’opérateurs de jeux de hasard qui s’estimeraient lésés, devant les juridictions nationales et communautaires, en raison de l’incompatibilité de la Loi avec les principes de droit communautaire précités. En outre, il nous semble que les règles de concurrence (notamment, les règles relatives au contrôle communautaire des aides d’Etat) pourraient utilement être utilisées pour contester la Loi. Dans le même ordre d’idées, la Commission Européenne pourrait décider d’enclencher la procédure en constatation de manquement contre la Belgique afin de faire déclarer l’incompatibilité de la Loi avec le droit communautaire.
Le législateur belge pourrait donc être invité à revoir sa copie…