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Le COVID booste la prescription électronique de médicaments

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Coïncidence du calendrier : la prescription médicale électronique est en vigueur en Belgique depuis le 1er janvier 2020. Le coronavirus a engendré un assouplissement supplémentaire : le code électronique peut désormais être envoyé par des moyens électroniques à distance (WhatsApp, mail, sms, etc.). La relation patient-médecin peut donc être entièrement dématérialisée quand c’est médicalement opportun. Et demain : la livraison du médicament via Internet ?

La consultation médicale à distance

Nécessité fait loi : la téléconsultation médicale s’est imposée pendant le confinement du printemps dernier. Les instructions des pouvoirs publics étaient claires (et devraient rester inchangées pendant un certain temps) : si vous pensez être atteint du coronavirus, ne vous précipitez pas à l’hôpital ou chez votre médecin. Vous risquez de contaminer des patients sains dans la salle d’attente si vous êtes porteur ou, à l’inverse, d’attraper un virus que vous n’avez pas en côtoyant une population malade. À la place, il est recommandé d’appeler son médecin ou les services de secours. Ceux-ci font un tri sur la base des informations communiquées par téléphone, fournissant ainsi, le cas échéant, un diagnostic à distance.

Nous avons déjà consacré une actu à ce sujet et au cadre juridique applicable.

La prescription de médicaments à distance

Qui dit diagnostic à distance dit, dans certains cas, prescription de médicaments à distance.

La covid-19 et le développement forcé de la téléconsultation qu’elle implique, semblent avoir porté un coup d’accélérateur à un processus de dématérialisation des prescriptions médicales qui peine, depuis plusieurs années, à se déployer pleinement.

En Belgique, la prescription électronique n’est pas apparue avec le coronavirus. Elle est même … obligatoire, sauf cas exceptionnels, depuis le 1er janvier 2020.

Son déploiement est le fruit d’un long et tortueux parcours.

L’e-prescription était envisagée déjà dans le Plan d’action E-Santé 2013-2018 (Protocole d’accord du 29 avril 2013). Il était prévu alors qu’elle remplace la prescription papier signée de la main du médecin et qu’elle devienne la norme dès le 1er janvier 2018. Des difficultés d’ordre technique ont empêché de tenir ce planning.

La prescription électronique : obligatoire en Belgique

Il a fallu attendre qu’un arrêté royal soit adopté, le 5 mai 2019, pour que la date à laquelle la prescription électronique devient obligatoire soit déterminée. C’est ainsi que, finalement, la prescription électronique est devenue obligatoire à compter du 1er janvier 2020. C’est par une pure coïncidence de calendrier que le basculement a eu lieu juste avant la crise sanitaire.

À ce jour donc, il n’est (en théorie) plus autorisé pour les prescripteurs, qu’il s’agisse des médecins, des dentistes ou des sages-femmes, de délivrer à leurs patients une prescription de médicaments sous forme papier.

Par dérogation, la prescription papier peut encore être utilisée lorsqu’elle est rédigée en dehors du cabinet du prescripteur (par exemple, lorsque le médecin se rend au domicile de son patient) ou en cas de force majeure rendant impossible l’utilisation de la prescription électronique (panne du système par exemple). Une dérogation est également prévue au bénéfice des prescripteurs âgés de plus de 64 ans au 1er janvier 2020, ceux-ci pouvant encore utiliser les prescriptions sous format papier.

À quoi sert la prescription-papier que remet encore le médecin ?

Pourtant, si vous êtes allé chez le médecin récemment, vous aurez quand même reçu un papier qui, pour le commun des mortels, ressemble comme deux gouttes d’eau à la prescription d’antan.

Pour comprendre ce qui se passe, il faut savoir que la prescription électronique, devenue obligatoire, désigne un système dans lequel le prescripteur (le médecin par exemple) rédige une prescription, cryptée et envoyée dans un système de stockage temporaire de prescriptions créé à cet effet. Ladite prescription ne peut ensuite être décryptée et lue que par les personnes habilitées à l’exécuter (notamment les pharmaciens pour ce qui concerne les prescriptions de médicaments).

Le décryptage se fait grâce à un code qui prend la forme d’un code-barres nommé Recip-e ou « RID ». Seules certaines personnes – des professionnels de santé – sont habilitées à accéder à ce programme soit pour y envoyer des prescriptions soit pour en extraire. Le prescripteur, pour accéder à ce système peut utiliser soit son logiciel de Dossier Médical Informatisé (DMI), soit le logiciel du Dossier du Patient Informatisé (DPI) de l’hôpital, soit l’application PARIS (Prescription & Autorisation Requesting Information System) développée par l’INAMI à cet effet.

C’est là que le papier que le médecin remet encore au patient, joue un rôle. Ce papier constitue la preuve de la prescription électronique et contient le fameux code RID. Il n’est donc pas la prescription en tant que telle, il n’en a d’ailleurs pas la valeur juridique, mais il l’atteste et donne un numéro qui permet de l’identifier dans le système.

C’est donc ce papier imprimé que le patient devra présenter en pharmacie pour obtenir les médicaments prescrits. Ce papier est, en fait, essentiel car il contient le code RID qui permet au pharmacien d’accéder à la prescription inscrite par le médecin dans le programme de prescription électronique et de la décrypter.

On a donc un système dual :

  • La prescription est dématérialisée,
  • mais son code de décryptage, ou à tout le moins le moyen de transmission de ce code, ne l’est pas.

À terme, il est envisagé que cette preuve papier disparaisse au profit d’un système qui permettra au patient de se rendre en pharmacie et renseigner son code RID grâce à sa carte d’identité. La dématérialisation de la prescription médicale n’est donc, à ce jour, qu’à mi-chemin.

Le COVID accélère les choses

Avec le COVID, les choses ont été poussées plus loin.

On se souviendra que l’objectif est d’éviter autant que possible les contacts rapprochés interpersonnels, et la manipulation de documents touchés par les mains de plusieurs personnes. C’est au nom de cet objectif que la téléconsultation a été facilitée (voir notre actu sur ce sujet).

Si tel est l’objectif, à quoi sert-il de tout dématérialiser si, au bout du compte, un contact médecin-patient est malgré tout nécessaire pour remettre le code RID sur papier, à remettre ensuite au pharmacien ?

Pour résoudre, au moins temporairement, cette équation, l’arrêté royal n° 21 du 14 mai 2020 allège le processus en permettant une transmission du code RID par des canaux dématérialisés, au moins le temps de l’épidémie.

Selon l’article 8 de cet arrêté royal n° 21, « pour contribuer à limiter la propagation du virus COVID-19, un dispensateur qui prescrit un médicament peut, avec l’accord de son patient, ne pas lui remettre la « preuve de prescription électronique » sur papier, pour lui transmettre plutôt le « code RID » de la prescription par un autre moyen de communication (mail, téléphone, Skype, etc.). Le code RID est le code-barres qui représente le numéro de prescription unique de la prescription de médicaments. Sur chaque prescription électronique, sa traduction en lettres et en chiffres figure sous ce code-barres ». A notre connaissance, cette possibilité laissée aux prescripteurs et à leurs patients, est encore en vigueur.

Reste une dernière question : que peut/doit transmettre le médecin quand il envoie à distance ce code : seulement le code RID, ou un document plus complet (par exemple, un scan du papier en format pdf) ?

Le médecin préfère souvent envoyer le scan du papier qu’il aurait remis au patient, plutôt que le seul code RID, car le nom – lisible – des médicaments y figure. Cela permet un meilleur suivi et un contrôle plus précis de la délivrance et de la consommation. Toutefois, la crainte des médecins est que ce fichier pdf tombe en de mauvaises mains, par exemple un mari trop curieux ou des parents trop contrôlants qui auraient accès à la boite email des autres membres de la famille. Dans certaines communautés, le problème serait particulièrement aigu.

L’arrêté royal n’apporte pas expressément la réponse. Il n’interdit pas d’envoyer, avec le code, d’autres informations, tel la liste lisible des médicaments prescrits. Il ne l’oblige pas non plus. Vu l’urgence, ce détail n’a probablement pas été pris en compte.

Trois pistes de réflexion subsistent :

  • Il faut intégrer à la réflexion le RGPD qui impose, surtout pour des données aussi sensibles, un niveau de sécurité suffisant. On déconseille l’envoi d’informations lisibles et précises vers une adresse email non-personnelle ([email protected] par exemple) ou appartenant manifestement à un tiers, même apparenté (sauf en cas de personne mineure).
  • On privilégiera les communications vers un appareil mobile relié à un numéro attribué à une personne spécifique qui est aussi le patient (SMS ou WhatsApp par exemple) ou, mieux encore, une application ad hoc, sécurisée et permettant l’identification du destinataire.
  • L’arrêté royal demande « l’accord du patient ». Le médecin doit donc expliquer ce qui se passe et s’assurer que la communication a lieu selon un procédé accepté.
  • Enfin, le bons sens : prendre en compte la situation de chaque patient. En général, le médecin connait son patient et son environnement, surtout pour la médecine de première ligne. Il faut donc lui laisser la possibilité de faire à distance tout ce qu’il ferait dans son cabinet, ni plus ni moins.

Demain, la vente en ligne de médicaments soumis à prescription ?

Belgique et France sont alignées sur une même ligne : la possibilité de vendre en ligne des médicaments, s’arrête aux produits pour lesquels une prescription médicale est requise.

Le droit européen n’interdit pas d’autoriser la vente, sur Internet, de médicaments soumis à prescription. Il ne l’exige pas non plus. Le choix est laissé aux États. L’Allemagne, par exemple, autorise la vente en ligne des médicaments soumis à prescription.

Puisque tout est désormais dématérialisé dans la relation médecin-patient (lorsque le praticien estime que rien ne s’y oppose sur le plan médical), plus rien ne s’oppose, en pratique, au dernier chainon : le patient, ayant reçu son code RID, se connecte au site de sa pharmacie et, dûment authentifié (carte d’identité électronique, itsme, etc.), il commande en ligne le médicament soumis à prescription qui lui sera livré le lendemain.

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