La LEN est enfin adoptée par le Parlement ! Le Conseil constitutionnel sera-t-il saisi ?
Publié le 12/05/2004 par Thibault Verbiest, Jean-Christophe CHEVALLIER
Nous y sommes ! Après l’Assemblée nationale le 6 mai, la loi sur la confiance dans l’économie numérique vient d’être votée par le Sénat aujourd’hui. La loi a été votée telle qu’elle avait été transmise aux sénateurs par les députés de l’Assemblée. Aucune modification n’a été apportée au projet. En effet, seule la numérotation des…
Nous y sommes ! Après l’Assemblée nationale le 6 mai, la loi sur la confiance dans l’économie numérique vient d’être votée par le Sénat aujourd’hui. La loi a été votée telle qu’elle avait été transmise aux sénateurs par les députés de l’Assemblée. Aucune modification n’a été apportée au projet. En effet, seule la numérotation des dispositions a été revue, bref une finalisation du texte.
Une question de taille demeure toutefois : les députés de l’opposition vont-il attaquer le texte devant le Conseil Constitutionnel, comme ils en ont déjà proféré la menace ? A en croire, certaines actualités, il semblerait que le parti socialiste saisira d’office le conseil constitutionnel.
Passons brièvement en revue les principales dispositions susceptibles d’être critiquées au regard de la Constitution :
Les Hébergeurs : responsables ou non ?
Le fait de mettre à la charge des hébergeurs une obligation de retrait des données, mises en ligne par un tiers, présumées illicites, ou bien, à défaut de retrait, les obliger à rendre ces données inaccessibles, est jugée par certrains comme contraire à la liberté d’expression.
Cette disposition, contenue dans l’article 6 relatif aux prestataires techniques, a pour objectif de mettre les hébergeurs face à une obligation de contribuer à la lutte contre la diffusion de certaines infractions de presse (ex : apologie de crimes contre l’humanité, incitation à la haine raciale, pornographie enfantine, etc…).
Ici, le législateur semble imprégné de grandes affaires qui ont, récemment, fait jurisprudence, telle que l’affaire Yahoo !.
Il appartiendra donc au Conseil Constitutionnel de contrôler cette disposition afin de déclarer si oui ou non, les hébergeurs sont érigés au rang de « juge de proximité » ce qui, dans ce cas, irait au -delà de leurs prérogatives.
Le courrier électronique : correspondance privée ?
Selon les députés socialistes, ne pas prévoir que les courriels relèvent de la correspondance privée porte atteinte au droit au respect du secret de la vie privée. En ce sens, la LEN ne serait pas conforme à l’article 34 de la Constitution, qui précise que la loi doit nécessairement « fixer les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ».
Il appartiendra donc au Conseil de juger s’il est nécessaire que la LEN rappelle la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication, qui reconnaît qu’un courriel relève de la correspondance privée.
Un délai de prescription différent : régime discriminatoire pour la communication en ligne ?
Enfin, l’opposition refuse l’application, aux publications sur l’internet, d’un délai de prescription, en cas de litige, différent (3 mois suivant la fin de la mise à disposition du public du texte en infraction) de celui prévu par la loi du 29 juillet 1881, en matière de délit de presse (3 mois après la publication).
Ils considèrent que cela porte atteinte au principe d’égalité des supports, voire même une atteinte au principe de non-rétroactivité des délits et des peines.
C’est donc sur ces trois points principaux que le Conseil Constitutionnel devra statuer, et ce rapidement..