La clause de marché intérieur fonctionne. La preuve par l’AFSSAPS.
Publié le 26/11/2006 par Etienne Wery
L’AFSSAPS montre l’exemple en appliquant à la lettre la clause de marché intérieur. Alors que l’Agence avait pris une mesure d’interdiction contre un site belge sans respecter la procédure prévue par la clause de marché intérieur, elle prend quelques semaines plus tard une nouvelle décision annulant la première. Ce faisant, elle ne renonce pas à…
L’AFSSAPS montre l’exemple en appliquant à la lettre la clause de marché intérieur. Alors que l’Agence avait pris une mesure d’interdiction contre un site belge sans respecter la procédure prévue par la clause de marché intérieur, elle prend quelques semaines plus tard une nouvelle décision annulant la première. Ce faisant, elle ne renonce pas à critiquer le fond du problème, mais s’engage à respecter la procédure prévue par la directive sur le commerce électronique. Bravo !
Les faits
Une société belge commercialise sur son site web différentes méthodes de relaxation, et les présente comme ayant un intérêt thérapeutique dans des situations pathologiques comme l’infarctus, l’angine de poitrine, la céphalée, les migraines, la gastrite, etc.
La méthode proposée n’est pas commune : elle consiste à écouter des morceaux de musique choisis en fonction de telle ou telle pathologie. Tel CD de sonates de Mozart est supposé avoir un effet bénéfique sur une pathologie telle que l’infarctus, alors que tel autre de Schubert s’attaquera plus spécifiquement à la migraine.
La réaction de l’AFSSAPS
L’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) apprécie peu la démarche qui présente les CD comme ayant un effet thérapeutique que l’Agence n’estime pas établi.
L’AFSSAPS prend une décision le 13 janvier 2006.
Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L51 22-15, 54 22-12, 54 22-14 et R51 22-23 à R51 22-26, et après mise en demeure par laquelle elle demande à la société belge la preuve scientifique des allégations revendiquées dans la publicité que constitue le site web, elle interdit la publicité, sous quelque forme que ce soit, en faveur de la méthode de méta-relaxation. La décision est publiée au journal officiel de la république française, et prend effet trois semaines après la publication.
La clause de marché intérieur
La société belge contacte son avocat. Celui-ci, très adroitement, prend attache avec l’AFSSAPS et invoque la clause de marché intérieur qui prévoit, en résumé, que les services de la société de l’information relèvent du droit de leur Etat d’origine et qu’avant de prendre une mesure dérogatoire spécifique à l’encontre d’un service déterminé presté par une société établie dans un autre état membre, la France doit prendre contact avec les autorités de l’Etat d’origine pour que celles-ci prennent des mesures si le droit national l’exige.
Or, après avoir vérifié auprès de la Commission européenne, l’avocat signale à l’AFSAAPS que ladite procédure d’information des autorités belges et de la Commission, prévue à l’article 3 de la directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 dite directive sur le commerce électronique, n’a pas été respectée par l’agence préalablement à la prise de la décision précitée.
Et là, merveille : l’AFSSAPS joue totalement le jeu.
L’Agence prend une nouvelle décision le 3 août 2006, par laquelle, vu la directive sur le commerce électronique et plus particulièrement l’article 3.4 prévoyant l’obligation pour les états membres d’accomplir des procédures d’information préalables à l’édiction de mesures restreignant la libre circulation des services de la société d’information en provenance d’un autre état membre, l’agence décide de retirer purement et simplement sa décision.
Cela ne signifie pas que l’AFSSAPS renonce purement et simplement à critiquer la diffusion, notamment vers la France, des produits de méta-relaxation, mais uniquement qu’elle s’engage à respecter l’article 3 de la directive.
On s’en réjouit. Le cas est trop rare pour ne pas être souligné. Sans prendre position pour ou contre l’une ou l’autre des parties à ce litige, saluons uniquement le fait que la clause de marché intérieur fonctionne.
L’intervention de SOLVIT
A bonne source, nous apprenons par ailleurs que SOLVIT est intervenue dans le dossier, prenant fait et cause pour le respect de la clause de marché intérieur.
L’organisme européen ne s’est absolument pas prononcé sur la légalité ou non des procédés consistant à vendre des CD de méta-relaxation en les présentant comme ayant un impact thérapeutique, mais uniquement sur le fait que la clause de marché intérieur trouve à s’appliquer et doit être respectée.
SOLVIT est un réseau de résolution de problèmes en ligne: les États membres de l’UE y coopèrent pour régler, de façon pragmatique, les problèmes résultant de la mauvaise application de la législation du marché intérieur par les autorités publiques. Il existe un centre SOLVIT dans chaque État membre de l’UE (ainsi qu’en Norvège, en Islande et au Liechtenstein).
Les centres SOLVIT peuvent contribuer à traiter les plaintes émanant à la fois des citoyens et des entreprises. Ces centres font partie de l’administration nationale et s’engagent à fournir des solutions réelles à des problèmes réels dans un bref délai de dix semaines. Les services fournis par SOLVIT sont gratuits.
SOLVIT fonctionne depuis juillet 2002. Il est géré par les États membres mais c’est la Commission européenne qui fournit les installations et, si besoin est, propose une assistance pour accélérer la résolution des problèmes. Elle transmet également certaines des plaintes officielles qu’elle reçoit au système SOLVIT lorsqu’il existe de bonnes chances de régler le problème en question sans engager d’action en justice.
Plus d’infos ?
En lisant les décisions de l’AFSSAPS, disponibles sur notre site web.