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Internet et compétence des tribunaux en matière pénale

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Le 9 juin dernier, une juridiction d’appel du New Jersey (« Appellate Division panel ») a rendu une décision intéressante concernant la compétence des tribunaux en matière pénale, lorsque le délit est commis sur Internet.   Les faits    Tammy Blakey, pilote d’un Airbus de la compagnie aérienne Continental Airlines, et première femme à occuper cette…

Le 9 juin dernier, une juridiction d’appel du New Jersey (« Appellate Division panel ») a rendu une décision intéressante concernant la compétence des tribunaux en matière pénale, lorsque le délit est commis sur Internet. 
 

Les faits  
 

Tammy Blakey, pilote d’un Airbus de la compagnie aérienne Continental Airlines, et première femme à occuper cette fonction aux Etats-Unis, avait gagné une véritable fortune (plus de 1,5 millions USD) à titre de dommages et intérêts, dans une affaire de harcèlement sexuel et de « abuse comments » imputables à certains de ses collègues masculins. 

Ceux-ci, en guise de représailles, propagèrent sur l’»electronic bulletin board » de la compagnie, dont l’accès était réservé au personnel, des propos diffamatoires et vulgaires à l’encontre de la pilote, qui décida finalement de porter plainte pour diffamation devant les tribunaux de New Jersey, siège de la compagnie. 
 

La décision 
 

La juridiction saisie se déclara territorialement incompétente par application de la théorie des « minimum contacts », consacrée depuis des décennies par la Cour Suprême des Etats-Unis.  

En effet, selon les juges, les employés poursuivis n’avaient pas de « contacts » suffisants avec l’Etat du New Jersey, et ce même si les propos diffamatoires y étaient disponibles via le réseau. Les juges précisèrent que leur compétence à l’égard de non-résidents de l’Etat de New Jersey (ce qui était le cas des prévenus) ne pouvait être retenue que si ceux-ci avaient « spécifiquement dirigé leurs commentaires » diffamatoires vers New Jersey, que la plaignante était résidente locale et que l’infraction avaient produit ses effets dommageables sur le territoire de l’Etat. Or aucune de ces conditions n’étaient réunies 

La pilote a déclaré qu’elle attaquerait la décision devant la Cour Suprême. 
 

Commentaires 
 

Cette jurisprudence, si elle se confirme, risque de compromettre pas mal d’actions en matière d’Internet aux Etats-Unis. Comment établir que telle ou telle infraction était destinée initialement à produire ses effets dans tel Etat plutôt que dans tel autre, si le Net a été utilisé pour commettre le délit ? 

En France et en Belgique, où la théorie dite de l’ubiquité est d’application, il ne fait aucun doute que la plainte aurait été déclarée recevable, dans la mesure où il suffit que l‘un seul des éléments constitutifs du délit ait été réalisé sur le territoire national. En matière de diffamation, il suffira ainsi de constater que l’élément « publicité » a bien été réalisé sur le territoire français ou belge, ce qui sera toujours le cas sur Internet. Les juges français ont même parfois été plus loin, par exemple en matière de contrefaçon, en décidant qu’ils étaient compétents au seul motif que la contrefaçon avait produits ses effets dommageables en France, et ailleurs.  

Bref, les juges de New Jersey ont opté pour un critère de compétence, qui, poussé à l’extrême, risque de rendre tous les tribunaux incompétents, tandis que les droits français et belge ont pour conséquence de rendre les juges nationaux universellement compétents dès lors que l’infraction est commise sur Internet. 

A quand un juste milieu ? 
 

Pour plus d’infos sur la compétence des tribunaux français en cas de délits commis via Internet : 
 

Notre actualité de décembre 1998 sur l’affaire Faurisson  
 

Notre article « Les casinos virtuels : une nouvelle cybercriminalité ?»», publiée sur Legalis.net.  
 

Droit & Technologies

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