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Google shopping condamné pour abus de position dominante. Quelle est la suite probable ?

Publié le par 41 vues

La Cour de justice de l’Union européenne a confirmé l’amende de 2,4 milliards d’euros infligée à Google pour avoir abusé de sa position dominante en favorisant son propre service de comparaison de produits. Le pourvoi formé par Google et Alphabet a été rejeté. Demain, c’est le contrôle des prix qui sera au coeur du modèle et posera de nouvelles questions. Une guerre est déclarée entre Google et Amazon. Analyse et décryptage des enjeux.

Les faits

Lancé pour faciliter la comparaison de produits en ligne, Google Shopping permet aux utilisateurs de voir instantanément des options d’achat avec des prix, des visuels et des avis directement dans les résultats de recherche. Ce service se présente comme une vitrine numérique attrayante, où les produits sont soigneusement mis en avant dans des « boxes » spécialement conçues pour capter l’attention des internautes. Cependant, derrière cette simplicité apparente, une véritable bataille s’est jouée.

En 2017, la Commission européenne a constaté que, dans treize pays de l’Espace économique européen (Belgique, République tchèque, Danemark, Allemagne, Espagne, France, Italie, Pays-Bas, Autriche, Pologne, Suède, Royaume-Uni et Norvège), Google avait privilégié, sur sa page de résultats de recherche générale, les résultats de son propre comparateur de produits au détriment de ceux des concurrents.

Concrètement, Google affichait son service de comparaison de produits en première position dans des « boxes » attrayants, enrichis de visuels, prix, et avis, ce qui augmentait considérablement le taux de clics. En revanche, les résultats de recherche des comparateurs concurrents n’étaient que de simples liens textuels, souvent relégués plus bas sur la page et potentiellement rétrogradés par des algorithmes.

« Google, en contrôlant l’algorithme, contrôle la visibilité », avait déclaré un expert en économie numérique ajoutant que ce pouvoir de hiérarchisation fausse le jeu concurrentiel de manière invisible pour les consommateurs.

La Commission a conclu que ce comportement constituait un abus de position dominante et a infligé à Google une amende de 2,4 milliards d’euros, somme à laquelle Alphabet est solidairement tenue. Voir la décision de la Commission du 27 juin 2017).

Procédure devant la Cour de justice 

Google et Alphabet ont contesté la décision, mais en novembre 2021 le Tribunal de l’UE a confirmé l’amende, bien qu’il ait annulé certaines parties concernant l’impact anticoncurrentiel potentiel sur le marché de la recherche générale. Google a ensuite formé un pourvoi, demandant l’annulation de la décision dans son ensemble.

Ce 10 septembre 2024, la Cour de justice (grande chambre) a rejeté ce pourvoi, confirmant ainsi la validité de l’amende. La Cour a rappelé que l’article 102 TFUE sanctionne les abus de position dominante qui restreignent la concurrence. La Cour a conclu que, dans ce cas, Google avait adopté un comportement discriminatoire contraire à la concurrence par les mérites.

« La décision de la Cour est un rappel fort que personne, pas même les géants de la technologie, n’est au-dessus des règles européennes », a déclaré la Commission, satisfaite. De son côté, Google a exprimé sa « déception » face à cette décision, affirmant que son service améliorait l’expérience utilisateur en facilitant la recherche de produits.

Impact sur le secteur numérique 

L’affaire Google Shopping s’inscrit dans un contexte plus large de régulation des grandes entreprises technologiques. Après cette décision, des experts s’attendent à voir émerger des actions similaires contre d’autres géants comme Amazon, dont les pratiques sur leur marketplace sont souvent critiquées.

Pour plusieurs observateurs, cette décision marque un tournant dans la manière dont l’UE encadre les géants de la tech et pourrait ouvrir la voie à des enquêtes plus approfondies sur le comportement de ces entreprises dans des secteurs où elles détiennent une position dominante.

Cette affaire rappelle les débuts des procès antitrust contre Microsoft dans les années 2000, lorsqu’il était accusé d’avoir favorisé Internet Explorer au détriment de Netscape. À l’époque, cette décision avait également eu un impact majeur sur la régulation des grandes entreprises de la tech.

Et demain ? Le contrôle des prix et la guerre à Amazon !

Un modèle d’affaires qui va au-delà de la comparaison pour devenir une quasi place de marché

Aujourd’hui, Google Shopping ne se contente plus de simplement comparer les prix : le géant de la tech s’implique directement dans la vente des produits via des accords commerciaux avec les vendeurs. Grâce à son programme « Acheter sur Google » et à ses surfaces de vente intégrées, Google propose aux marchands d’héberger et de vendre leurs produits directement sur sa plateforme. Ce système permet à Google de jouer un rôle actif dans la fixation des prix, ajustant les tarifs en fonction de multiples facteurs, tels que les tendances du marché, la concurrence, et même le comportement des utilisateurs.

Ce système permet aussi de se positionner en concurrent direct d’Amazon.

L’algorithme, nouvel acteur dans la stratégie de prix

Le cœur de ce modèle repose sur l’algorithme de Google, qui ajuste les prix automatiquement.

L’objectif ? Maximiser les chances de conversion, tout en offrant aux consommateurs l’impression d’une « meilleure affaire ». Cet ajustement dynamique des prix, qui se fait souvent en temps réel, offre des avantages considérables aux vendeurs en termes de visibilité et de ventes. Cependant, il pose aussi des questions cruciales : dans quelle mesure ces prix reflètent-ils une véritable compétition, et jusqu’à quel point Google influence-t-il les choix d’achat ?

Ce modèle est potentiellement disruptif.

L’un des enjeux réside dans la transparence. Si Google peut choisir quel produit mettre en avant et à quel prix le proposer, cela soulève des interrogations sur l’équité pour les autres vendeurs. Ces derniers, qui ne concluent pas d’accords directs avec Google ou dont les produits ne sont pas intégrés dans les « Surfaces Across Google », se retrouvent en situation difficile.

De plus, cette approche pourrait également influencer les marges des commerçants, Google étant capable de moduler les prix en fonction de ses propres objectifs commerciaux.

Autre souci : il se pourrait bien que l’internaute trouve via Google un produit à un prix inférieur à celui pratiqué par le marchand qui vend ce produit au travers de Google. De là à créer une pratique généralisée qui verrait Google devenir le point d’entrée de toute recherche liée au commerce électronique, il n’y a qu’un pas. Par ailleurs, l’application des règles en matière de réduction de prix sont délicates dans un schéma comme celui-là.

Vers une régulation des algorithmes ?

Ces pratiques ouvrent la voie à un débat plus large sur la régulation des algorithmes. Alors que les autorités de la concurrence se concentrent sur les abus de position dominante, de nouveaux fronts s’ouvrent concernant le contrôle des algorithmes de fixation des prix. À terme, cela pourrait donner lieu à des actions réglementaires plus strictes pour s’assurer que ces pratiques ne conduisent pas à une distorsion excessive du marché.

Un futur incertain pour les acteurs du e-commerce

Alors que Google renforce son emprise sur le secteur du commerce en ligne, les vendeurs et les concurrents de Google doivent s’adapter à un paysage où les prix et la visibilité sont dictés par un acteur central. La question clé est de savoir si ces pratiques seront encadrées ou si elles continueront à se développer sans régulation, ouvrant la voie à des déséquilibres encore plus marqués dans l’écosystème du e-commerce.

Une chose nous parait certaine : une guerre est déclarée, opposant Google et Amazon, et cela fera des dégâts …

Plus d’infos

Arrêt de la Cour de justice disponible en annexe.

Droit & Technologies

Annexes

CURIA – Arret de la cour

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