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Enregistrement abusif de noms de domaine : la loi du 26 juin 2003 apporte-t-elle la solution adéquate ?

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Par l’introduction en droit belge de la loi du 26 juin 2003, le législateur a désiré mettre un terme à la pratique de l’enregistrement abusif de noms de domaine dans un but uniquement spéculatif. Cette loi n’est cependant pas à lire de manière isolée. Elle doit en effet être interprétée en corrélation avec d’autres législations…

Par l’introduction en droit belge de la loi du 26 juin 2003, le législateur a désiré mettre un terme à la pratique de l’enregistrement abusif de noms de domaine dans un but uniquement spéculatif. Cette loi n’est cependant pas à lire de manière isolée. Elle doit en effet être interprétée en corrélation avec d’autres législations telles que les législations protectrices de marques, de noms commerciaux, de noms de sociétés…

Les noms de domaine peuvent être enregistrés par le biais d’une simple demande auprès de la société gestionnaire de noms de domaine compétente. En Belgique, pour les noms de domaine ‘.be’, DNS joue ce rôle de gestionnaire.

Diverses bases juridiques afin d’obtenir la cessation d’un domain name grabbing

Diverses législations peuvent être utilisées afin d’obtenir la cessation d’un enregistrement abusif d’un nom de domaine.

  1. Violation de législation sur les marques

    L’article 13,A,1 de la loi uniforme Benelux sur les marques du 19 mars 1962 offre la possibilité au titulaire légitime d’une marque d’intenter une action en référé en vue de voir sa marque protégée.

    En vertu du principe de territorialité il pourra donc intenter une action en vue de sanctionner un enregistrement abusif de sa marque, ou d’un signe identique à sa marque pouvant prêter à confusion, comme nom de domaine « .be » ou « .com ».

    Notons que l’utilisation du nom de domaine n’est pas une condition requise afin d’être qualifié d’enregistrement abusif. En effet, même si l’enregistrement ne sert qu’à bloquer un nom de domaine sans pour autant l’utiliser, le titulaire de la marque sera en droit d’attaquer cet enregistrement.

    Le moment de dépôt ou d’enregistrement de la marque n’est de même pas relevant en l’espèce. La dénomination sera ainsi opposable au titulaire du nom de domaine litigieux même si au moment de l’enregistrement du nom de domaine la marque sur laquelle on se base n’était pas encore enregistrée.

  2. Violation de l’article 93 de la loi sur les pratiques de commerce.

    L’utilisation abusive d’une dénomination commerciale est illégale aux yeux de l’article 20 de la convention de Paris du 20 mars 1883 et de l’article 93 de la loi sur les pratiques de commerce (ci-après « LPC »). Sur cette base, il est possible d’introduire une action en cessation devant le président du tribunal de commerce en vue de sanctionner un enregistrement d’un nom de domaine portant atteinte à sa dénomination commerciale (soit qu’il soit identique, soit qu’il suscite la confusion).

    La protection apportée par la PLC est plus large que celle de la loi du 26 juin 2003. La loi de 2003 exige en effet que l’enregistrement ait pour but de nuire à un tiers ou d’en tirer un avantage non justifié. La LPC ne requiert quant à elle pas une telle condition. Il est seulement nécessaire que l’enregistrement nuise ou puisse nuire aux intérêts d’un consommateur ou d’un commerçant. De surcroît, l’article 93 LPC peut aussi servir à sanctionner l’enregistrement d’un nom de domaine « .com ».

  3. La responsabilité extra contractuelle.

    En vertu de l’article 10ter de la Convention de Paris la raison sociale d’une société est protégée même sans dépôt ou inscription. Il est donc possible de protéger une raison sociale sur base de la simple responsabilité extra-contractuelle. C’est ainsi que dans la première affaire de domain name grabbing en Belgique, le nom de domaine Tractebel a dû être rendu à la société Tractebel entre autre sur base de l’article 1382 du code civil.

    Le même raisonnement peut être tenu en ce qui concerne la protection des noms de famille comme le démontre l’affaire Julia Roberts du centre d’Arbitrage et de Médiation de l’OMPI.

  4. La loi sur l’enregistrement abusif de noms de domaine.

    L’article 4 de la loi du 26 juin 2003 sanctionne l’enregistrement abusif d’un nom de domaine. La loi du 26 juin 2003 met à la disposition de toute personne physique ou morale victime d’un enregistrement abusif de nom de domaine une action en cessation spécifique. Afin de pouvoir bénéficier de cette action, deux conditions doivent être remplies : (i) l’enregistrement incriminé doit avoir trait à une dénomination qui doit être identique ou susceptible de générer la confusion avec un signe distinctif dont le plaignant est titulaire et (ii) l’enregistrement incriminé ne doit reposer sur aucun intérêt légitime.

    Cette loi ne s’applique que pour sanctionner les enregistrements abusifs de noms de domaine « .be » et pour autant que les titulaires du nom de domaine incriminé ait son domicile ou un établissement en Belgique.

Instances compétentes afin de sanctionner un enregistrement abusif de nom de domaine

  1. Action en cessation devant les tribunaux ordinaires.

    Comme nous l’avons vu, diverses actions en cessation devant les juridictions ordinaires sont prévues afin de sanctionner les cas de domain name grabbing. Sont ainsi compétents, le président du tribunal de première instance ainsi que le président du tribunal de commerce. Ils peuvent ordonner la radiation d’un enregistrement, la cession du nom de domaine enregistré ainsi que la publication du jugement dans la presse.

  2. Modes de résolution extra-judiciaires.

    L’ICANN a émis en 1999 un règlement visant au règlement des conflits en matière de noms de domaine. Ces règles ne s’appliquent toutefois qu’aux noms de domaine « .com », « .org » et « .net ». Ces règles sont de nature contractuelle de sorte qu’elles ne trouvent de facto à s’appliquer qu’après acceptation par les parties. L’ICANN n’intervient pas directement dans les conflits, elle désigne certains Dispute Resolution Providers (ex. : OMPI, eResolution, National Arbitration Forum…) afin que ceux-ci interviennent directement tout en suivant des règles de procédure édictées par ses soins. Les sanctions pouvant être prises sont l’annulation ou la modification de l’enregistrement ainsi que la cession du nom de domaine.

    En ce qui concerne les noms de domaine « .be », le CEPINA arbitre les litiges concernant les noms de domaine enregistrés par le biais de DNS. Ici aussi, seuls la radiation ou la cession de l’enregistrement peuvent être ordonnés.

  3. Prévalence des juridictions ordinaires.

Notons qu’en cas de contradiction entre les décisions judiciaires et les décisions administratives, les décisions judiciaires primeront.

Intervention limitée du gestionnaire des noms de domaine et responsabilité.

Les noms de domaine sont enregistrés en suivant le principe « first come-first serve » de sorte que le gestionnaire ne vérifie aucunement la légitimité de l’enregistrement requis. DNS n’effectue comme contrôle avant d’accéder à la demande d’enregistrement qu’un simple contrôle de disponibilité. Si le nom de domaine est effectivement libre, DNS l’enregistrera au nom du demandeur sans aucunement vérifier le lien entre le nom de domaine enregistré et le demandeur.

Cet enregistrement n’est valable qu’une année et est soumis à l’acceptation par le demandeur des conditions générales de DNS

Cet état de fait est selon nous critiquable. Une simple enquête du gestionnaire pourrait en effet être suffisante afin d’éviter bon nombre de conflits. Ainsi pourrait-il être prévu dans les règlements internes de ces institutions que l’enregistrement peut (doit ?) être refusé en cas de pratique manifeste de domain name grabbing.

Quelques réflexions critiques autour de la loi du 26 juin 2003.

Compétence limitée du juge. La loi a déterminé la compétence du juge sur base de critères propres au titulaire du nom de domaine litigieux. Il faut en effet que celui-ci soit installé en Belgique. N’aurait-il pas été plus judicieux de déterminer la compétence de juge sur base de la personne du plaignant, titulaire légitime du nom de domaine, et donc de se déclarer compétent dès que le titulaire a son domicile ou établissement principal en Belgique ?

Allègement de la charge de la preuve. La charge de la preuve de l’enregistrement abusif, et donc de ses trois conditions cumulatives, repose sur le plaignant. Or, apporter de telles preuves est loin d’être évident. Pourquoi ne pas avoir fait reposer la charge de la preuve sur le titulaire du nom de domaine, à lui de prouver que l’enregistrement n’était en rien abusif.

Plus d’infos ?

En prenant connaissance de la loi sur l’enregistrement abusif des noms de domaines

En prenant connaissance de l’étude complète réalisée par les auteurs (document rédigé en néerlandais)

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