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Elections électroniques : le juge des référés tance sévèrement le gouvernement

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Le 8 octobre prochain la Belgique connaîtra des élections communales. C’est devenu (presque) une habitude : les citoyens voteront électroniquement dans plusieurs communes. Certains électeurs n’apprécient pas, et ont demandé au juge des référés des mesures provisoires : Interdire à l’Etat belge de fournir aux bureaux principaux, aux bureaux de vote et aux bureaux de…

Le 8 octobre prochain la Belgique connaîtra des élections communales. C’est devenu (presque) une habitude : les citoyens voteront électroniquement dans plusieurs communes. Certains électeurs n’apprécient pas, et ont demandé au juge des référés des mesures provisoires :

Interdire à l’Etat belge de fournir aux bureaux principaux, aux bureaux de vote et aux bureaux de dépouillement des communes de Saint-Gilles et Ixelles, les logiciels de vote et de systèmes de totalisation des votes émis, établis en application de la loi sur le vote automatisé, d’ordonner à l’Etat belge de fournir à ces mêmes bureaux le papier électoral sur lequel seront imprimés des formules de vote, l’ensemble sous peine d’une astreinte de 100.000.000 FB.

L’ordonnance rendue ce 15 septembre est intéressante à plus d’un titre.

Arguments de procédure

L’Etat belge a avancé plusieurs arguments de procédure, tenant d’une part à l’absence de compétence du juge judiciaire, et d’autre part à l’absence de compétence du juge des référés. Ces points sont moins pertinents pour notre analyse, mais il faut tout de même signaler la remarquable motivation de l’ordonnance concernant l’effet direct en droit interne du Pacte International de New-York relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966.

Arguments de fond

Invoquant leur droit à un vote secret et honnête impliquant un contrôle indépendant des opérations de vote et de dépouillement, les demandeurs sollicitaient les mesures rappelées ci-dessus.

Le juge commence par préciser qu’il n’est pas là pour comparer les avantges des votes papier et électronique, mais qu’il statue seulement sur une demande précise relative aux garanties de vote secret et honnête sous un contrôle indépendant. A cet égard, le juge est sévère pour le système mis en place.

C’est principalement le contrôle par une autorité indépendante du pouvoir qui retient l’attention du magistrat.

Ce contrôle revient à un collège d’experts qui peut être nommé par les assemblées législatives. Les compétences du collège sont fixées comme suit par la loi du 12 août 2000 modifiant la loi du 11 avril 1994 :

Contrôler l’utilisation et le bon fontionnement de l’ensemble des systèmes de vote et de dépouillement automatisé ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l’utilisation des appareils, des logiciels et des supports d’information électroniques. Les experts reçoivent du ministère de l’intérieur le matériel ainsi que l’ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer un contrôle sur les sytèmes de vote et de dépouillement automatisés.

Ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels des machines à voter, la transcription exacte par l’urne électronique des suffrages exprimés, ainsi que leur totalisation et la lecture optique des votes exprimés.

Ils effectuent ce contrôle à partir du 40ème jour précédent l’élection, le jour de l’élection et après celle-ci, juqu’au dépît du rapport visé par au § 3.

Partant de ce texte, le magistrat émet trois observations :

  1. Les assembles peuvent nommer un collège, mais elles n’y sont pas tenues;

  2. La loi prévoit une entrée en fonction du collège 40 jours avant les élections, mais les élections auront lieu moins de 40 jours après l’entrée en vigueur de la loi;

  3. Ce délai raccourci est encore empiété dans les faits par le temps qu’il faut nécessairement aux assemblées pour désigner les experts.

Le juge des référés n’y va pas par quatre chemins : ce système est un bricolage inefficace.

Il relève notamment que vu les expériences passées, il est matériellement impossible pour un collège de 9 experts disposant d’aussi peu de temps, d’effectuer un contrôle sérieux autrement que par coups de sonde.

Ensuite, le juge fustige le fait que le collège peut être désigné par les assemblées, mais qu’il ne doit obligatoirement l’être, et que s’il est mis sur pied c’est par une assemblée parlementaire politisée. On est loin du contrôle indépendant que le magistrat aurait aimé.

Les élections se poursuivent néanmoins

On aurait pu croire à la lecture de cette motivation que la demande allait être reçue.

Point du tout ! En effet, au-delà des demandeurs, les élections concernent des milliers de citoyens auxquels une ordonnance d’interdiction s’imposerait de facto, donnant ainsi à la décision une autorité erga omnes inconciliable avec le principe de la relativité de l’autorité de chose jugée.

Le juge refuse donc de faire droit à la demande. En quelque sorte, c’est un sérieux carton jaune que le gouvernement reçoit, mais pas encore un rouge.

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