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De l’opt-out à l’opt-in : la jurisprudence et la Commission Vie Privée stigmatisent l’absence de régime transitoire

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Le spamming est un fléau ; tous ceux qui en souffrent en conviendront. Mais la communication commerciale est aussi un droit des vendeurs et se révèle parfois très intéressante pour le public. Il fallait donc trouver un juste milieu que les pays européens espèrent avoir atteint avec l’opt-in. La Belgique a mis son droit en…

Le spamming est un fléau ; tous ceux qui en souffrent en conviendront. Mais la communication commerciale est aussi un droit des vendeurs et se révèle parfois très intéressante pour le public. Il fallait donc trouver un juste milieu que les pays européens espèrent avoir atteint avec l’opt-in. La Belgique a mis son droit en conformité … mais le législateur a oublié de créer un régime transitoire. Que faire des fichiers constitués sous l’empire de l’ancienne loi quand l’opt-out était la règle, mais réutilisés après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi ?

Il n’a pas fallu longtemps pour qu’un litige naisse à ce sujet et que la jurisprudence comble la carence législative. Simultanément, la Commission pour la protection de la Vie privée à aussi donné son avis sur cette délicate question.

D’où vient le problème ?

La loi du 11 mars 2003 dite « sur le commerce électronique » a fait passer la Belgique d’un régime d’opt-out à un régime d’opt-in :

  • Dans l’opt-out, il est « par défaut » permis d’adresser des publicités par courrier électronique aux prospects, mais il faut cesser l’envoi dès que le destinataire marque son opposition aux envois futurs ;

  • L’opt-in obéit à la logique inverse : on ne peut pas adresser de publicités par courrier électronique tant que l’on n’a pas obtenu le consentement du prospect.

L’objectif principal de cette loi était de transposer la directive 2000/31 sur le commerce électronique.

Pourtant, cette directive n’impose pas l’opt-in.

Si la loi du 11 mars 2003 a malgré tout décidé d’imposer l’opt-in, c’est parce qu’elle a anticipé la transposition d’une autre directive, étant la directive 2002/58 sur la vie privée dans le secteur des télécommunications. L’objectif de cette dernière directive est d’adapter le régime général de la protection des données personnelles (fixé par la directive 95/46) au secteur des télécommunications. C’est donc la directive 2002/58 qui impose l’opt-in en cas de publicité envoyée par courrier électronique.

Une des faiblesses de la directive 2002/58 est de n’avoir pas prévu de régime transitoire pour les pays – la majorité des Etats européens – qui sont passés d’un régime d’opt-out à un régime d’opt-in.

La question est pourtant importante : que faire des millions de fichiers qui ont été constitués partout dans l’Union sous l’empire de l’ancienne législation et qui étaient donc, au moment de leur constitution, parfaitement légaux ?

La loi belge n’a pas non plus envisagé cette question, ce qui est regrettable.

La situation est plus claire dans d’autres pays. Ainsi, la France (projet de loi) a opté pour une « amnistie unique » : après l’adoption de la loi, les gestionnaires de fichiers disposent de 6 mois pour régulariser le consentement, qui peut parfaitement prendre la forme d’un « si vous souhaitez vous opposer à l’avenir aux envois commerciaux, veuillez nous le signaler en nous renvoyant ce courrier électronique ».

La réponse jurisprudentielle

Le tribunal de commerce de Nivelles a rendu ce 26 novembre 2003 une décision de principe sur cette question. Pour le tribunal :

Le législateur n’a évidemment pas exigé des publicistes qu’ils « se sabordent » en détruisant leurs fichiers de prospects. Ils disposent donc encore des fichiers qu’ils utilisaient avant la loi du 11 mars 2003.

La loi belge ne met en place aucune procédure que les sociétés actives dans le domaine de la publicité électronique devraient suivre pour obtenir le consentement « préalable » désormais nécessaire des personnes auxquelles ils voudraient, désormais, adresser des publicités.

L’article 14 de la loi du 11 mars 2003 qui interdit l’envoi de messages publicitaires électroniques sans le consentement préalable, libre, spécifique et informé du destinataire des messages, prévoit (§2, 2°) que le prestataire doit fournir une information claire et compréhensible concernant le droit de s’opposer, pour l’avenir, à recevoir des publicités, et mettre à disposition du destinataire un moyen approprié d’exercer efficacement ce droit (de refus des messages futurs).

Il faut donc conclure de cet article de la loi que le législateur autorise implicitement les sociétés de publicité électronique à prendre un premier contact avec toutes les personnes qui figureraient dans leur fichier avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi du 11 mars 2003 (ces personnes étant présumées avoir tacitement accepté de recevoir des messages publicitaires sous l’ancien régime puisqu’elles renseignent leur adresse électronique sur un site web ou l’avaient communiquées d’une autre manière à ces sociétés de publicité ou à leurs employés) mais que ces sociétés se voient interdire tout autre envoi dès réception d’un avis de refus de publicités ‘pour l’avenir’.

L’avis de la Commission pour la protection de la vie privée

La Commission va dans un sens similaire mais pas identique. Elle a publié le 29 octobre 2003 un avis sur ce point :

Dans le cas d’espèce, la Commission a constaté que la Belgique, en étant la première à transposer la directive 2002/58CE sur les communications commerciales non sollicitées, n’a pas réglé le problème de l’utilisation des données déjà recueillies avant l’entrée en vigueur de la loi du 11 mars 2003.

Les autres pays de l’Union n’ont toujours pas transposé cette directive et la France envisage une période de transition de 6 mois pour permettre aux fournisseurs de services électroniques d’utiliser une seule et dernière fois les informations relatives aux clients ou prospects ayant été collectées loyalement afin d’offrir à ces derniers la faculté d’exprimer leur consentement à de futures opérations de prospection directe.

La Commission estime raisonnable sur le plan économique de s’inspirer de cette méthode, mais de raccourcir le délai à 2 mois, soit jusqu’au 31 décembre 2003.

Ainsi, elle entend rencontrer la bonne foi des fournisseurs de services électroniques dans la mesure où leur collecte de données s’est effectuée loyalement, c’est-à-dire en conformité avec la réglementation en vigueur avant la loi du 11 mars 2003 précitée. Elle veut donner une chance de préserver une base de données qui a demandé un investissement certain et ainsi contribuer à l’équilibre entre l’intérêt légitime des uns et des autres.

La Commission ne peut bien sûr que s’engager elle-même, et non d’autres instances, comme le SPF Affaires économiques ou les autorités judiciaires, si celles-ci venaient à être saisies directement par une plainte ou une dénonciation.

Elle réserve son attitude conciliante à l’égard des seuls fournisseurs qui ont collecté loyalement les données avant le 11 mars 2003 et qui utilisent une dernière fois avant le 31 décembre 2003 ces données uniquement en vue d’obtenir le consentement des personnes concernées.

Et la Commission de fournir un modèle de texte à envoyer aux personnes figurant dans les anciens fichiers.

La Commission est donc très proche du tribunal de commerce de Nivelles, mais elle se démarque sur deux points :

  1. D’une part, elle fixe un délai ;

  2. D’autre part, à la fin de son modèle « d’amnistie », elle écrit que « en l’absence de réponse de votre part avant le 31 décembre 2003, nous devrons hélas rayer votre adresse e-mail de notre fichier ». Bref, l’absence de réponse vaut refus.

Rappelons que la Commission n’a qu’un pouvoir d’avis ; nous ne doutons pas que ces deux conditions seront un jour soumises à un juge.

Plus d’infos ?

En prenant connaissance du jugement rendu à Nivelles, en ligne sur notre site.

En prenant connaissance de l’avis de la Commission, en ligne sur notre site.

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