Contrefaçon en Chine : mis sous pression, le leader Alibaba contraint de prendre des mesures
Publié le 11/01/2017 par Etienne Wery , Thomas Dubuisson
Les USA en ont marre de la contrefaçon en Chine et placent Alibaba, le plus gros acteur chinois, sur la liste noire annuelle des sociétés qui vendent de la contrefaçon. En réaction, on assiste à la première action judiciaire jamais prise en Chine par une plateforme de e-commerce contre des vendeurs de produits contrefaits. Alibaba veut faire un exemple et réclame plus de 200.000 dollars pour « violation du contrat et de goodwill ».
Alibaba, Taobao, c’est qui/quoi ?
Le groupe Alibaba a été fondé en 1999 par une équipe de 18 membres, dirigée par M. Jack Ma, président du groupe. La société détient près de 80% de parts de marché en Chine et est tout simplement la plus grande société de commerce en ligne au monde en termes de volume de marchandises brut.
Alibaba exploite différentes marchés en Chine :
- « Taobao » : le plus grand des sites de C2C d’Alibaba, équivalent à eBay, mais sans l’enchère. La société génère des revenus en vendant des annonces sur des pages sélectionnées et des résultats de recherche. C’est désormais la marque la plus chère en Chine estimée à 230 milliards de yuans (31 milliards d’euros). En comparaison, la marque « Apple » est évaluée à $ 154 milliard.
- « Tmall » : la plus grande plate-forme de Chine pour le commerce B2C.
- « Juhuasuan » : le marché le plus populaire en Chine qui offre, sous forme de promotions, des produits et services des vendeurs présents sur Taoboa.
Ces trois marchés représentaient plus de 75% du total des revenus d’Alibaba. En plus de ces trois marchés, Alibaba dispose aussi de Alibaba.com, 1688.com, et AliExpress.
Une action judiciaire pas si anodine…
En décembre dernier, le Bureau du représentant américain au commerce (USTR) a placé Taobao, appartenant au géant de l’Internet Alibaba, sur sa liste noire des marchés notoirement réputés pour vendre des biens contrefaits et pour violer les droits de la propriété intellectuelle.
« La plateforme de e-commerce Taobao.com est source d’une grande inquiétude du fait d’un important volume de biens soupçonnés contrefaits et piratés et des difficultés que les détenteurs des droits de la propriété intellectuelle rencontrent quand ils veulent s’opposer aux ventes et offres illicites des produits concernés » soulignait le Bureau américain.
Rien de bon pour une société qui vend également ses produits aux Etats-Unis…
La réaction du géant chinois fut immédiate.
Alibaba a déposé une plainte devant le tribunal populaire de Longgang de Shenzhen (« Shenzhen Longgang People’s District Court ») contre les deux vendeurs réclamant 1,4 million de yuans (201 320 dollars) pour « violation de contrat et de goodwill ».
Dans sa déclaration officielle, Alibaba a décrit comment la société a pu identifier un des marchands grâce à un système interne. La société a utilisé une combinaison de « mistery shopping » (acheteur mystère) et de big data.
Ce mécanisme « d’acheteur mystère », lancé en 2011, est un des systèmes de contrôle préventif contre les atteintes aux droits de propriété intellectuelle mis place par le géant chinois. En pratique, Alibaba procède à un prélèvement d’échantillons aléatoires destinés à être examinés par des organismes tiers de contrôle de qualité ou par les propriétaires de marques concernés visant à lutter contre la contrefaçon.
Grâce à ce mécanisme, Swarovski a ensuite examiné la qualité, la fabrication et l’emballage des échantillons et a confirmé que les montres étaient des produits contrefaits.
Cette première action judiciaire témoigne d’une prise de conscience ; il s’agit autant de lutter contre la contrefaçon que d’envoyer un message rassurant selon lequel le géant chinois prend des mesures pour lutter contre la contrefaçon. Une application du dicton chinois selon lequel il faut « tuer la poule pour effrayer le singe » (faire un exemple).
Pas certain que le message a été entendu. Même si les médias chinois estiment que la plateforme e-commerce mérite un grand applaudissement (Global Times Chine), la réaction de Bloomberg a été beaucoup plus cynique, notant simplement que Alibaba « a besoin de plus d’avocats ».