Citer des pages Web contrefaisantes serait illégal (Etats-Unis)
Publié le 18/12/1999 par Thibault Verbiest
Dans une ordonnance de référé (preliminary injunction) du 6 décembre, disponible en ligne, un tribunal fédéral de l’Utah (U.S. District Court de Salt Lake City) a enjoint une association sans but lucratif ( Utah Lighthouse Ministry)de cesser de « poster » sur son site des e-mails indiquant les URL où pouvaient être lues des copies pirates du…
Dans une ordonnance de référé (preliminary injunction) du 6 décembre, disponible en ligne, un tribunal fédéral de l’Utah (U.S. District Court de Salt Lake City) a enjoint une association sans but lucratif ( Utah Lighthouse Ministry)de cesser de « poster » sur son site des e-mails indiquant les URL où pouvaient être lues des copies pirates du « Church of Jesus Christ of Latter-Day Saints book ».
L’Eglise de Jésus Christ affirmait en effet que la mise en ligne de ces liens constituait un acte de complicité de contrefaçon (« contributory infringement) » de son ouvrage précité.
Antérieurement à cette décision, la partie défenderesse avait déjà été contrainte par ordonnance de supprimer de son site des chapitres entiers du livre litigieux.
Toutefois, l’association décida ensuite de mettre en ligne des emails de visiteurs indiquant les adresses URL d’autres sites Web où trouver les copies illicites.
L’ordonnance ne manque pas de surprendre :
absence de complicité de contrefaçon par rapport aux sites contrefaisants
Le tribunal considère que l’association n’est pas complice de la contrefaçon commise par les sites auxquels renvoient les adresses URL litigieuses, dans la mesure où elle n’aurait pas elle-même fourni les copies illégales et où elle ne recevrait aucun profit de leur mise en ligne.
visiter un site contrefaisant serait illégal
Les internautes qui visitent les sites « cités » sur la page Web de l’association commettraient un acte de contrefaçon dans la mesure où le simple fait de surfer équivaudrait à une copie au sens du US Copyright Act. En effet, la visite d’un site entraîne une copie des pages Web dans la mémoire RAM de l’ordinateur.
Autrement dit, toute connexion à un site qui contiendrait des oeuvres reproduites illégalement serait constitutive de contrefaçon directe (!).
indiquer l’adresse d’un site contrefaisant serait une complicité de la contrefaçon que constitue sa visite
Le fait d’indiquer les adresses URL où se trouvent les copies illicites serait constitutif de complicité de contrefaçon dans la mesure où, ce faisant, le site « citant » encouragerait la consultation, et la cas échéant la copie, d’oeuvres contrefaites sur le réseau.
Il est inutile de dire que cette décision, pourr le moins critiquable, fait l’effet d’une bombe outre-Atlantique (voir la sélection d’articles de presse sur le site de l’association).
En particulier, il est reproché au tribunal d’avoir lié la complicité au « browsing » et non à la reproduction des oeuvres litigieuses en ligne, ce qui aurait été plus défendable sur le plan des principes (l’association savait que les adresses URL renvoyaient à des sites contrefaisants).
En outre, la complicité de contrefaçon a été jugée établie non pas en raison de l’existence d’hyperliens mais en raison d’adresses URL inactives…
L’affaire contine au fond. Nous vous tiendrons informés.