Accès au marché des communications électroniques : du régime d’autorisation au régime déclaratif
Publié le 18/05/2003 par Franklin Brousse
Nous poursuivons notre cycle de 7 analyses consacrées à l’analyse du paquet télécoms, et plus spécifiquement à sa transposition en droit français. Après le panorama général dressé la semaine passée, nous nous intéressons aujourd’hui à l’accès au marché. Le « paquet télécom » fait allusion, en jargon du droit des nouvelles technologies, à un corps…
Nous poursuivons notre cycle de 7 analyses consacrées à l’analyse du paquet télécoms, et plus spécifiquement à sa transposition en droit français. Après le panorama général dressé la semaine passée, nous nous intéressons aujourd’hui à l’accès au marché.
Le « paquet télécom » fait allusion, en jargon du droit des nouvelles technologies, à un corps de règles d’origine européenne, adopté entre 1999 et 2002.
Qu’en est-il exactement ? A la suite de la libéralisation, au 1er janvier 1998, des marchés des télécommunications, la Commission européenne lançait en 1999 la procédure de réexamen du cadre réglementaire (ancien) des télécommunications. La même année, elle réalisait un « état des lieux » du cadre et constatait les nombreuses difficultés rencontrées dans son application, notamment en raison de la convergence entre les télécommunications, les technologies de l’information et des médias. Par ailleurs, dès 1999, tout le monde a senti la nécessité de « toiletter » les textes : supprimer ce qui n’avait plus de sens parce que le secteur avait entre-temps été libéralisé, et coordonner le reste pour en faire un corps plus simple et cohérent. De ce travail législatif mené à l’échelon européen est sorti le paquet télécom auquel nous avons consacré de nombreuses analyses.
Rappelons que ce cycle est une republication, avec l’aimable l’accord de l’auteur, d’une série d’analyses publiées dans le JournalDuNet.
Le régime des autorisations laisse place à un régime déclaratif
Conformément aux directives « Cadre » et « Autorisations » visant à permettre à tout opérateur d’exercer son activité sans obtenir préalablement de l’autorité de régulation compétente une décision expresse ou tout autre acte administratif, l’avant projet de loi introduit un nouveau régime déclaratif en lieu et place d’un régime d’autorisation.
L’expression « autorisation » est ainsi remplacée par l’expression « déclaration » modifiant la rédaction de l’article L.32.1 du CPT aux termes duquel les activités de télécommunications s’exerceront désormais librement dans le respect des déclarations prévues au nouveau CPT.
Ce changement de régime devrait sans nul doute pousser de nombreux acteurs de la filière télécoms à envisager l’opportunité de devenir opérateur ou fournisseur de services dans des conditions plus favorables qu’auparavant.
Aux termes de l’exposé des motifs de ce projet, la suppression des autorisations individuelles précédemment exigées pour certaines activités (établissement des réseaux ouverts au public, fourniture du service téléphonique au public, établissement des réseaux câblés) devrait apporter un surcroît de dynamisme au marché.
L’avant projet de loi réaffirme donc le principe de liberté d’établissement et d’exploitation des réseaux et de fourniture des services de communications électroniques.
Désormais, il suffira d’une déclaration préalable auprès de l’ART pour établir et exploiter des réseaux ouverts au public et fournir au public de services de communications électroniques.
Aucune déclaration ne sera pas exigée pour l’établissement et l’exploitation des réseaux ouverts au public internes et pour la fourniture au public de services de communications électroniques sur ces réseaux.
Seule limite au principe de liberté, les personnes auxquelles le droit d’établir et d’exploiter un réseau ouvert au public ou de fournir au public un service de communications électroniques aura été retiré ou suspendu, ne pourront effectuer de déclaration auprès de l’ART.
En contrepartie de ce principe de liberté, l’établissement et l’exploitation des réseaux et la fourniture des services de communications électroniques sera soumis à l’application de règles dont la plupart figuraient actuellement au cahier des charges des opérateurs ou fournisseurs.
Ces règles portent notamment sur les conditions de permanence, de qualité et de disponibilité du réseau et des services, les conditions de confidentialité et de neutralité au regard des messages transmis et des informations liées aux communications, les normes et spécifications du réseau et des services.
Le secret des correspondances, auparavant à la charge de l’exploitant public, des opérateurs de réseaux ouverts au public et des fournisseurs de services de télécommunications, devrait être limité aux opérateurs, ainsi qu’aux membres de leur personnel qui seront tenus de le respecter.
Par ailleurs, les opérateurs devront respecter les prescriptions exigées par la protection de la santé et de l’environnement et par les objectifs d’aménagement du territoire et d’urbanisme, comportant, le cas échéant, les conditions d’occupation du domaine public et les modalités de partage des infrastructures.
Ils devront notamment garantir l’acheminement gratuit des appels d’urgence, la fourniture et le financement du service universel et des services obligatoires, ainsi que l’interconnexion et l’accès dans des conditions nécessaires pour assurer l’interopérabilité des services.
Pour les réseaux indépendants, un régime de liberté simplifié
Le projet tend à une simplification des dispositions relatives aux réseaux indépendants et aux réseaux et installations pouvant être librement établis et exploités sans déclaration ni autorisation préalable, à savoir les réseaux indépendants, les installations radioélectriques n’utilisant pas de fréquences spécifiquement assignées à leur utilisateur (tels que les bornes installées dans les Hot Spots).
Le nouvel article L.33-2 réduit la liste des réseaux et installation concernés pour en faciliter la compréhension.
Bien que librement établis et exploités, ces réseaux et installations radioélectriques seront soumis au respect de règles portant notamment sur les prescriptions exigées en matière de défense et de sécurité publique, de santé et d’environnement, d’objectifs d’urbanisme, d’occupation du domaine public et de partage des infrastructures.
S’agissant plus particulièrement des installations radioélectriques, telles que les antennes wi-fi, les exploitants devront respecter également les conditions permettant d’éviter les brouillages préjudiciables et de limiter l’exposition du public aux champs électromagnétiques.
Conformément aux dispositions actuelles, l’avant projet de loi maintient le principe selon lequel l’exploitant de réseau indépendant ne peut conférer à son réseau le caractère de réseau ouvert au public sans déclaration préalable auprès de l’ART sous peine de sanctions.
Les dispositions transitoires
Afin d’aménager un régime transitoire souple pour les personnes déjà titulaires d’une autorisation, ces dernières seront réputées avoir satisfait, pour l’activité autorisée, à l’obligation de déclaration prévue par la nouvelle loi.
Concernant les personnes exerçant à la date d’entrée en vigueur de la loi une activité (ne nécessitant pas actuellement d’autorisation) mais visée par les futures dispositions de l’article L. 33-1 du CPT, elles seront tenues d’effectuer la déclaration dans un délai de six mois à compter de cette date.
Les obligations imposées aux opérateurs exerçant une influence significative sur un marché du secteur des communications électroniques à la date de publication de la future loi, resteront applicables jusqu’à la mise en œuvre des nouvelles dispositions.
De même, les obligations de fourniture du service public et de financement du service universel imposées aux opérateurs à la date d’entrée en vigueur de la future loi resteront applicables jusqu’à la mise en œuvre des nouvelles procédures.
Concernant l’utilisation des fréquences, les autorisations en vigueur à la date de publication de la future loi conserveront leurs effets jusqu’au terme prévu par ces autorisations ou jusqu’au terme de l’autorisation d’établir et d’exploiter un réseau de télécommunications délivrée aux exploitants titulaires de ces autorisations d’utilisation de fréquences.
Les distributeurs de services de communication audiovisuelle disposeront d’un délai de trois mois à compter de l’entrée en vigueur de la future loi pour effectuer la déclaration prévue à cet article.
Toutefois, lorsque ces distributeurs étaient titulaires d’une autorisation d’exploitation délivrée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel préalablement à l’entrée en vigueur de la présente loi, cette autorisation est regardée comme une déclaration.