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Que faire quand deux logiciels se ressemblent un peu trop ?

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Le TGI de Paris rappelle que le programme d’ordinateur n’est protégé que dans sa forme d’expression, laquelle permet de déterminer l’œuvre dont la protection est recherchée. Cette preuve incombe au demandeur. Ayant débouté sur le terrain de la propriété intellectuelle, le tribunal sanctionne toutefois le défendeur qui s’est placé dans le sillage d’une application innovante pour en tirer un profit indu.

La protection via le droit d’auteur

La protection juridique des programmes d’ordinateur est assurée au sein de l’Union européenne à travers le droit d’auteur. Tel est le principe fermement affirmé par l’article premier de la directive 2009/24 du 23 avril 2009 : « les États membres protègent les programmes d’ordinateur par le droit d’auteur en tant qu’œuvres littéraires au sens de la convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. »

La conséquence principale qui en découle est la suivante : la protection juridique n’est assurée qu’à la condition de satisfaire au critère d’originalité, bien connu en droits d’auteur.

L’originalité est la condition sine qua non de la protection, mais elle est aussi une condition suffisante ; l’article premier de la directive le souligne : « Un programme d’ordinateur est protégé s’il est original, en ce sens qu’il est la création intellectuelle propre à son auteur. Aucun autre critère ne s’applique pour déterminer s’il peut bénéficier d’une protection. »

Quels sont les éléments protégés ?

La protection s’applique à toute forme d’expression d’un programme d’ordinateur. L’expression permet en effet de déterminer l’œuvre protégée.

Les idées et principes qui sont à la base de quelque élément que ce soit d’un programme d’ordinateur, y compris ceux qui sont à la base de ses interfaces, ne sont pas protégés par le droit d’auteur en vertu de la présente directive.

Dans l’affaire SAS (C-406/10), la Cour de justice a précisé que « ni la fonctionnalité d’un programme d’ordinateur ni le langage de programmation et le format de fichiers de données utilisés dans le cadre d’un programme d’ordinateur pour exploiter certaines de ses fonctions ne constituent une forme d’expression de ce programme et ne sont, à ce titre, protégés par le droit d’auteur sur les programmes d’ordinateur au sens de cette directive. »

Dans une récente affaire, le TGI de Paris a souligné toute la subtilité de cette matière.

Le tribunal rappelle d’abord qu’en application des dispositions de l’article L1 11-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit (quel qu’en soit le genre) jouit sur cette œuvre du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, pour autant que l’œuvre soit suffisamment déterminée et soit originale.

Or, dit le TGI, « aucune des pièces communiquées par la demanderesse ne décrit le contenu et les contours de l’application (…) revendiquée, ni au moment de sa diffusion initiale en juillet ou septembre 2013, ni dans sa version mise à jour de février 2014, de sorte que le tribunal ne connaît ni sa physionomie, ni sa structure, ni la composition et le contenu de ses écrans et ne saurait se trouver en mesure, indépendamment de la question ultérieure de l’originalité, de procéder à une quelconque comparaison entre les applications proposées par les parties.

Et le procès-verbal précité dressé par l’APP ne décrit l’application, sa structure, la succession des écrans, son ergonomie qu’à la date des constatations soit le 11 mars 2014, sans justifier de l’antériorité dont elle bénéficierait à l’égard de l’appli )…) concurrente, dont il est dit qu’elle date du 24 février 2014. »

Et la concurrence déloyale ?

À défaut de protection via la propriété intellectuelle, il reste la possibilité d’invoquer la concurrence déloyale, sur le fondement de l’article 1382 devenu 1240 du code civil.

On rappelle que cette protection ne peut viser que « des comportements distincts de ceux invoqués au titre de la contrefaçon, fautifs car contraires aux usages dans la vie des affaires, tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, ou ceux, parasitaires, qui tirent profit sans bourse délier d’une valeur économique d’autrui procurant à leur auteur, un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements. »

Dans l’affaire commentée ci-dessus, le TGI de Paris, après avoir refusé la protection de la propriété intellectuelle, constate que le demandeur a développé bien avant le défendeur une application innovante.

Et le TGI de noter que « S’il ne peut être octroyé un monopole à la (demanderesse), sur ce type de jeux en ligne et sur l’ergonomie de l’application contenant des fonctionnalités habituelles et communes, il n’en demeure pas moins que la présentation de chacune des applications est sans nécessité particulière, similaire (loteries proposées, pictogrammes signalant les sous-comptes, fréquence des loteries, classement des gagnants avec les même sous-rubriques, horloge numérique portant décompte de temps en réel avant le prochain tirage, compteur en temps réel sur le montant de la cagnotte).

En effet, il est repris un procédé certes différent mais assurant la gratuité du jeu et le financement de la cagnotte, une même fréquence de loteries (par jour, semaine, mois et spéciale), une ergonomie proche, traduisant une démarche volontaire afin de ressembler à l’application développée initialement et caractérisant un comportement fautif contraire aux usages des affaires et générant un risque de confusion dans l’esprit de l’internaute, qui sera amené à associer les applications concurrentes. »

Plus d’infos ?

En lisant le jugement, disponible en annexe.

En lisant notre dossier relatif à la protection juridique des programmes d’ordinateur (en anglais).

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